La France veut que le Conseil de sécurité de l'ONU passe à l'action sur la Syrie, condamnant son "silence" sur les violentes répressions dans ce pays, Washington n'hésitant plus de son côté à mettre en cause "la légitimité" du président Bachar al-Assad. Le pouvoir syrien a à cet égard vigoureusement condamné mardi les déclarations faites la veille par la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, qui a affirmé, pour la première fois en quatre mois de violences en Syrie, que Bachar al-Assad avait "perdu sa légitimité". "Il n'est pas parvenu à honorer ses promesses (...) le président Assad n'est pas indispensable", a jugé Mme Clinton. Et si les Américains n'ont pas officiellement appelé à ce jour au retrait du président Assad, ces propos sont les plus vigoureux du gouvernement de Barack Obama depuis le début de la crise en Syrie le 15 mars. "La Syrie dénonce vigoureusement les déclarations de la secrétaire d'Etat américaine, qui constituent une preuve supplémentaire de l'ingérence flagrante des Etats-Unis dans les affaires intérieures syriennes", a écrit le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Paris a pour sa part cherché mardi à accentuer la pression sur le Conseil de sécurité de l'ONU et entend convaincre la Russie de se rallier à une résolution condamnant la répression contre les manifestations. "La France a déposé avec d'autres pays européens une résolution devant le Conseil de sécurité des Nations unies qui est bloquée par la Russie et la Chine", a déclaré le Premier ministre français, François Fillon. "Ca n'est plus acceptable", a-t-il ajouté. "Le silence du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Syrie devient insupportable", a poursuivi M. Fillon. Quatre pays européens (Grande-Bretagne, France, Allemagne, Portugal) ont déposé il y a plusieurs semaines à New York un projet de résolution condamnant la répression en Syrie et appelant à des réformes politiques. Pour François Fillon, les "agressions extrêmement violentes" qui ont visé lundi les ambassades de France et des Etats-Unis à Damas montrent que le régime du président Bachar al-Assad "est dans une fuite en avant". "Nous essayons de convaincre les Russes notamment qu'il n'est pas acceptable que le Conseil de sécurité laisse se produire ce qui est en train de se produire en Syrie", a précisé le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé. Alliée de longue date de la Syrie, la Russie prône une non-ingérence dans les affaires de ce pays et dénonce régulièrement la façon dont les Occidentaux appliquent la résolution 1973 sur la Libye, qui a permis le 19 mars le déclenchement de bombardements contre les troupes fidèles à Mouammar Kadhafi. Les responsables occidentaux répètent cependant que la situation des deux pays n'est pas comparable et qu'il n'est pas question d'une intervention militaire en Syrie. Paris veut en outre que le Conseil de sécurité de l'ONU se prononce sur les attaques ayant visé son ambassade à Damas et celle des Etats-Unis. François Fillon a déclaré mardi à l'Assemblée nationale que la France tenait "les autorités syriennes pour responsables de la sécurité de (ses) représentations et de leurs agents" et assuré qu'elle ne "céderait pas aux intimidations". Des partisans du régime syrien ont attaqué lundi, pour la deuxième fois en trois jours, les deux ambassades afin de protester contre la visite en fin de semaine dernière des ambassadeurs américain et français dans la ville rebelle de Hama (centre), théâtre de deux manifestations monstres contre le président Assad ce mois-ci. Le Royaume-Uni a aussi condamné mardi ces attaques "inacceptables", perpétrées "avec la complicité des autorités syriennes". L'Iran et la Turquie ont quant à elles prôné des réformes politiques en Syrie et dans les autres pays arabes secoués par des révoltes populaires. En Syrie, les militants pour la démocratie ont dit être "catégoriquement" opposés à toute intervention militaire étrangère, tout en demandant davantage de pressions internationales sur le pouvoir. Des ONG syriennes ont dans le même temps appelé à la libération et à l'indemnisation des militants détenus. Le dialogue national que souhaite entamer le régime va débuter "le plus rapidement possible", ont, parallèlement, annoncé mardi les participants aux réunions préparatoires, qui ont été boycottées par les militants pour la démocratie. Lundi soir, des manifestations contre le pouvoir ont eu lieu dans plusieurs villes, notamment à Deir Ezzor (est) et à Homs (centre), ont fait savoir des militants.