L'année scolaire s'annonce déjà allégée pour les élèves inscrits dans les établissements de l'enseignement de base et ceux de l'enseignement secondaire. Ces derniers peuvent se réjouir de la suppression de 24 titres du programme de l'éducation civique, dont 11 alourdissaient inutilement le contenu pédagogique des manuels destinés aux élèves inscrits en Tunisie et 13 encombraient, des années durant, le programme des manuels destinés aux élèves tunisiens résidant à l'étranger. Ces vingt-quatre titres ont été, en effet, inclus pendant de nombreuses années dans le programme de l'éducation civique, et ce, à tous les niveaux sans exception. Leur finalité ne consistait point en l'initiation des jeunes générations à la vie politique et, encore moins, aux valeurs sûres de la citoyenneté et du patriotisme. Ces titres versaient dans une optique toute différente et de loin moins bénéfique. Tout comme la prolifération débordante et incontrôlable des messages vantant le parti alors au pouvoir et sacralisant en quelque sorte le président déchu et son épouse atteignait la population des adultes, créant ainsi une atmosphère propice à l'idolâtrie d'un couple présidentiel dont le peuple soupçonnait l'honnêteté, la catégorie des jeunes au sein de la société tunisienne avait, elle aussi, droit à sa part du mensonge. Des leçons, placées sous le signe de l'éducation civique, préparaient déjà les enfants inscrits à l'école et les ados à entrer dans le moule de la sphère idéologique du RCD. Le rassemblement constitutionnel démocratique était alors enseigné comme s'il s'agissait d'une notion-clé de la vie politique et civile, le repère même de la société tunisienne. Aussi, les divers programmes du président déchu, dont l'achèvement laissait à désirer, ses photos narcissiques et ceux de son épouse, les associations qui servaient leurs images beaucoup plus que les causes sociales qu'elles étaient censées défendre; tous ces messages redondants étaient introduits dans le programme d'éducation. Ainsi, les élèves inscrits en cinquième année avaient à contempler les photographies du président déchu et de son épouse comme si ces portraits manquaient dans le paysage urbain, dans les médias et jusque dans les administrations, boutiques, échoppes et même bicoques. Ils étaient appelés à réviser des cours portant sur le «fonds-trompe-l'œil de solidarité 26-26», sur le «changement du 7-novembre» et sur l'événement important qui consiste à baptiser une avenue «avenue 7 novembre». Les élèves de 8e année de l'enseignement de base devaient étudier des extraits des discours de Ben Ali et se faire une idée sur le tissu associatif au service du pouvoir, notamment l'association «Besma», l'Organisation tunisienne des mères, etc. Les titres relatifs à l'épouse du président déchu et à canal 7, jadis, maintenus sous l'emprise d'une oppression extravagante, figuraient dans les manuels de la 9e année. Cette année, et après une révolution qui a donné un bon coup de balai au mauve, couleur fétiche de l'ancien régime, le ministère de l'Education a supprimé tout ce qui renvoie à l'ère des mensonges et de la corruption. «Nous avons supprimé tout ce qui relève de la “farce politique” de l'ancien régime, ne gardant ainsi que les vraies notions-clés de la vie civile. Certes, nous n'avons pas eu le temps suffisant pour introduire un thème alternatif qui honore la révolution. Toutefois, cela sera certainement rattrapé l'année prochaine», indique M. Belgacem Lassoued, directeur d'édition au Centre national pédagogique.