Engager le pays sur le chemin de la prospérité. L'objectif est ambitieux, cependant il n'est d'autre choix raisonnable pour un pays et un peuple qui ont remarquablement, et d'une manière exemplaire, conduit la révolution du 14 janvier 2011. Un pays et un peuple qui ont porté jusqu'à incandescence tel un fil lumineux leur soif de liberté, de dignité, de justice sociale et de prospérité. Au regard du chemin parcouru depuis, en dépit des différentes secousses et turbulences, pour ce grand pays qu'est la Tunisie et pour ce grand peuple, la voie du progrès et de la justice est aujourd'hui à portée de main pour peu, bien entendu, que tous les Tunisiens, sans exclusive, fassent montre de la même maturité et de la même détermination pour transformer le ballon en essai. Les défis sont multiples. Ils ont pour noms: croissance et création d'emplois, investissement et développement régional équitable, bonne gouvernance, transparence, responsabilité sociale et participation citoyenne, migration vers une économie innovante et à grande valeur ajoutée, intégration mondiale approfondie et agissante… Ces défis appellent, à l'évidence, la mise en place d'une nouvelle approche et d'un nouveau modèle de développement favorisant la prospérité et la justice sociale. Ces défis appellent cependant des réponses urgentes à même justement de préparer une solide plateforme pour l'avenir. Conscient à la fois de l'acuité des problèmes qui exercent des effets handicapants sur la reprise économique et les perspectives de développement à moyen terme et de la nécessité de mobiliser les forces nationales pour y faire face et engager le pays sur le chemin de la prospérité, le gouvernement propose une stratégie de développement économique et social ayant un double objectif : 1- répondre aux besoins à court terme en termes de soutien à l'emploi et aux régions, d'appui aux entreprises, d'aide sociale et de maintien des équilibres du pays, 2- préparer l'avenir autour de dix grandes idées se rapportant aux priorités de développement au cours de la prochaine étape. Ainsi, pour ce qui est du programme économique et social d'urgence, il est notamment prévu un recrutement exceptionnel de 30 mille jeunes dans le secteur public et le lancement de projets dans les technologies de l'information, dans le cadre du partenariat public-privé. Volet institutionnel et social, le programme d'urgence entend renforcer la transparence et la gestion administrative et financière et adopter une approche ciblée pour s'assurer de la bonne affectation des aides sociales. Les actions sociales de court terme ont également pour objectifs l'amélioration des conditions de vie des habitants dans les régions défavorisées. Pour la période 2012-2016, la stratégie de développement s'articule autour de trois principes fondamentaux: l'Etat est le principal régulateur et catalyseur du développement, la libre entreprise et l'esprit d'initiative, la justice sociale et la participation citoyenne. 6,3 % de croissance Elle s'appuie sur un schéma de croissance et des politiques globales et sectorielles. L'objectif pour les cinq années 2012-2016 est la réalisation d'une croissance moyenne de 6,3%, la création de 500 mille emplois additionnels dont 300 mille pour les diplômés du supérieur, permettant de ramener le taux de chômage à 10,5% en 2016. Le schéma de croissance ambitionne même de ramener le taux de chômage à 8,5%, si les conditions d'une reprise plus rapide sont réunies. Pour ce qui est du revenu par tête d'habitant, il sera à l'horizon de 2016 porté à 9.746 dinars. A moyen terme donc, et au cours d'une phase de transition, il est prévu de reprendre un rythme de croissance supérieur à 5% en se rapprochant de 6% durant les années 2013-2014, à travers l'emploi d'un effort de rattrapage exceptionnel et l'engagement de réformes globales touchant les différents domaines politiques, économiques et sociaux. Il s'agit ensuite d'amorcer, au cours d'une phase d'émergence, un processus de convergence avec les pays développés à partir de 2015, en ciblant des niveaux de croissance supérieurs à 7%. La réalisation de ces objectifs implique trois impératifs : - Une migration accélérée vers l'économie du savoir à la faveur d'une augmentation de la part des activités à contenu élevé de connaissance et de technologie dans le PIB à 30% en 2016 et de la part des biens et services à fort contenu technologique dans les exportations à 50%. - Relèvement de la contribution des biens et services à la croissance à plus de 40% en fin de période et le triplement des IDE pour atteindre un volume total de 21,9 milliards de dinars. - Relèvement de l'investissement à des niveaux sans précédent. L'enveloppe globale proposée s'élève à 125 milliards de dinars, dont 50 milliards pour les zones de développement régional. Elle est répartie entre 50 milliards de dinars d'investissement public et 75 milliards de dinars d'investissement privé. A ce titre, les besoins de financement sont estimés à environ 150 milliards de dollars. Aussi il est prévu de renforcer l'épargne nationale pour atteindre 25,8% du revenu national disponible brut en 2016 et couvrir 70% des besoins de financement au cours de la période 2012-2016. Dans ce cadre, le schéma de développement préconise de limiter le déficit du budget de l'Etat à 4% du PIB et le déficit courant à 5% du PIB en moyenne, les ramenant respectivement à 3% et 3,1% en 2016. Cela permettrait de maintenir la dette publique inférieure à 40% du PIB et la dette extérieure en deçà de 40% du revenu national disponible brut. Ambitieuse et volontariste, la stratégie de développement économique et social que le Premier ministre transmettra au prochain gouvernement ne demeure pas moins tributaire d'un ensemble de facteurs qui, pour l'essentiel, appelle une nouvelle dynamique d'une ampleur peu commune de l'investissement et tout particulièrement de l'investissement privé. Il y a à cet égard fort à parier que la sphère de l'investissement privé saura faire montre d'une détermination et d'une participation active à la hauteur des multiples défis et de l'ambition de tout un pays qui aura sans doute choisi le chemin de la raison, le chemin de la prospérité.