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Pour que vive le 14 Janvier 2011
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 23 - 06 - 2011


Par Abdou BÂ *
Le Vendredi 14 janvier 2011 est un jour historique pour la Tunisie. Ce jour-là, le peuple tunisien, sa jeunesse en particulier, la bienveillance de l'armée nationale aidant, a mis fin, après environ un mois de révolte, à un régime dictatorial et antidémocratique. Le président Ben Ali, après plus de vingt trois ans au pouvoir, a été contraint par la volonté populaire de dégager.
Incontestablement, c'est là un événement et un tournant historiques pour la Tunisie et le monde arabe.
Le peuple tunisien qui, depuis l'accession à la souveraineté internationale du pays en 1956, vit quasiment sous le régime du parti unique, ne peut qu'être fier et digne de son sursaut d'orgueil sans précédent qui met un terme à un système politique à jamais révolu et ouvre une nouvelle ère de libertés porteuse d'espoirs.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et le mouvement de libération des territoires colonisés par les grandes puissances de l'époque qui s'en est suivi, on peut expliquer que les jeunes nations indépendantes, notamment les pays arabo-africains, vu le contexte international difficile marqué par la rivalité entre les deux blocs et les défis majeurs auxquels elles ont à faire face pour prendre en charge elles-mêmes leurs propres destinées, avaient besoin, pour promouvoir leur développement économique et social, de se doter d'un pouvoir politique fort et centralisé.
De ce point de vue, nous ne pouvons qu'apprécier à sa juste valeur les réalisations politiques, économiques et socioculturelles accomplies par la Tunisie sous la direction du Leader Habib Bourguiba, grand artisan de l'indépendance du pays.
Rappelons pour mémoire les principaux acquis du pays sous l'ère Bourguiba :
- L'abolition de la monarchie et l'instauration de la République.
- L'instauration de la laïcité et de l'Etat de droit, par la séparation de la politique et de la religion et des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.
- L'égalité en droit de tous les citoyens tunisiens.
- L'égalité en droit entre l'homme et la femme, notamment par la promulgation du Code du statut personnel (CSP).
- La gratuité de l'enseignement pour tous les Tunisiens.
- La gratuité des soins de santé pour les plus démunis.
- Le recul de l'illettrisme grâce aux progrès enregistrés dans la lutte contre l'analphabétisme.
- Un taux de croissance continue de l'économie tunisienne basée pour l'essentiel sur un secteur public dominant et un secteur privé prometteur.
- Le recul de la pauvreté par une politique sociale en faveur des plus défavorisés, avec comme corollaire la constitution d'une classe moyenne significative.
- Une politique internationale équilibrée qui a fait de la Tunisie un pays respecté dans le monde.
Ces importants acquis, réalisés sur une période de plus de deux décennies, n'ont pas eu pour cadre général un système politique progressivement démocratique et pluraliste, nonobstant la conjoncture internationale favorable aux libertés du début des années 80.
Le régime politique bourguibien, on peut le dire, était un régime non démocratique et autoritaire. L'instauration de la présidence à vie pour un homme de surcroît âgé et souffrant est une décision contraire aux principes démocratiques.
Les années 80 ont été marquées notamment par les difficultés économiques, les mouvements sociaux, les manifestations politiques, la répression policière, l'instabilité gouvernementale, etc., bref des conditions propices à l'arrivée au pouvoir du président Ben Ali.
Son avènement a été généralement bien accueilli, tant le pays avait besoin de sang nouveau pour relancer la machine économique grippée, rassurer les investisseurs étrangers, satisfaire les revendications sociales et politiques, prévenir toute dérive extrémiste, donner de l'espoir à la société civile, redorer l'image de la Tunisie sur le plan international, quelque peu ternie par la gouvernance d'un leader sénile.
Très tôt, il a fallu déchanter et on connaît la suite.
Les engagements de démocratisation de la vie politique n'ont pas été respectés. Un multipartisme de façade a été instauré, les élections organisées ont toujours largement profité au régime au pouvoir. Mieux, Ben Ali est revenu sur sa décision de limitation du mandat présidentiel, instaurant de fait la présidence à vie. Les libertés individuelles et collectives sont restées quasi inexistantes. L'opposition réelle et non reconnue a été durement réprimée, ses dirigeants étant arrêtés et emprisonnés, ou bien contraints de prendre le chemin de l'exil à l'étranger. La politique d'ouverture économique suivie a certes engendré une croissance significative. Toutefois, les retombées sociales n'ont pas profité aux régions et aux populations défavorisées, en dépit de la mise en place d'institutions de solidarité nationale.
L'observateur étranger amené souvent à visiter la Tunisie a très certainement remarqué les progrès économiques accomplis au fil des années. Tunis est devenue une capitale moderne, les stations balnéaires et les autres sites sont très prisés des touristes. La Tunisie est un bon risque et un solide rempart contre l'extrémisme pour les principaux partenaires du pays, à savoir les pays riches et développés, les investisseurs étrangers, ainsi que les institutions financières internationales.
Cette image flatteuse de la Tunisie, un pays émergent, stable et sans problème, a été toutefois sérieusement battue en brèche, comme on le sait, par les événements sans précédent qui ont conduit à la chute du président Ben Ali.
Une joie étouffante
En effet, on peut parler ici de l'arbre qui cache la forêt. La révolution du 14 Janvier 2011‑— eh oui il s'agit bel et bien d'une révolution‑— a tout simplement dévoilé la face cachée de l'iceberg, mettant à nu le véritable visage du régime de Ben Ali. Sans aucun doute, le peuple tunisien, sous son règne, a vécu plus de deux décennies d'injustice, d'inégalité, d'autocratie, de népotisme, de répression, et j'en passe…
Les "dividendes" de la croissance économique n'ont pas été équitablement répartis, profitant essentiellement à une minorité de Tunisiens, Ben Ali et son entourage notamment. La paupérisation et le désespoir ont touché de larges pans de la population, notamment les jeunes diplômés chez qui le taux de chômage est relativement élevé.
Dès lors, le ras-le-bol général et massif du peuple tunisien exprimé dans la rue au cours des mois de décembre 2010 et janvier 2011 et relayé sur le Net et les réseaux sociaux, comme une onde de choc, a poussé un certain vendredi 14 le dictateur à la sortie.
Ces événements, il faut les avoir vécus de l'intérieur, pour savoir combien c'est beau une révolution.
La révolution, dirons-nous, c'est ce moment fatidique où la rupture, voire le divorce, est définitivement décidée, entre le peuple et ses dirigeants. En fait, c'est de cela qu'il s'est agi, le 14 janvier. Trop, c'est trop…, les Tunisiens, dans leur écrasante majorité, ne voulaient plus de Ben Ali comme chef.
Ce jour-là, pour avoir été un témoin privilégié des faits, mais surtout en tant qu'ami de la Tunisie, je n'ai pas pu m'empêcher de pleurer, tellement une joie étouffante se dégageait en moi.
L'armée nationale, soulignons-le, a également influé de manière significative sur le cours des événements. En refusant de tirer sur le peuple malgré les injonctions du pouvoir, elle a prouvé au monde entier, s'il en était besoin, sa capacité à adhérer à la cause du peuple.
Pour ce qui est de la réaction à l'échelle planétaire, si tous les peuples ont pris fait et cause pour la révolution tunisienne, la position de la communauté internationale était quant à elle plutôt mitigée. A titre d'exemple, la France, que l'histoire et la géographie lient pourtant à la Tunisie, a mis du temps pour se rendre à l'évidence que le vent de l'histoire avait tourné à l'encontre de son ami Ben Ali, contrairement aux Etats-Unis qui avaient parfaitement anticipé le déroulement des événements, étant même favorables à un changement de régime.
L'onde de choc provoquée par l'avènement du 14 Janvier a vite fait tache d'huile. Partout dans le monde arabe, les peuples se sont mis à l'heure de la révolution tunisienne, créant ainsi les conditions favorables à un printemps arabe. Après la Tunisie, le peuple égyptien a eu droit à sa révolution. Au Yémen, le pouvoir est pratiquement à portée de main du peuple. En Syrie, malgré la répression sanglante exercée par le pouvoir, le peuple continue de s'opposer à la tyrannie du régime de Bachar Al Assad. En Libye, la lutte contre le colonel Kadhafi est âpre; elle risque de durer mais est tout de même porteuse d'espoirs. En Mauritanie, au Maroc, en Algérie, en Jordanie, bref dans les autres pays, les peuples continuent de réclamer avec détermination l'instauration de la démocratie.
Les formes modernes de lutte initiées au cours de la révolution du 14 Janvier, l'usage de l'Internet et des réseaux sociaux, les slogans, banderoles et pancartes scandés et brandies, ont fait le tour du monde, inspirant de nombreux manifestants dans leurs revendications politiques, économiques, sociales et syndicales.
Créer les meilleures conditions possibles
Comme toutes les révolutions, la révolution tunisienne a fait son lot de victimes, de chambardements, de bouleversements et de perturbations. Des morts, il y en a eu, dont notamment le martyr feu Mohamed Bouazizi qui a donné de sa vie, se rebellant ainsi contre l'arbitraire. Des blessés, il y en a eu; des fuites et départs vers l'étranger, des arrestations, des règlements de comptes, des manifestations pour ou contre, de la casse, des dégâts, du désordre, de la peur, de l'inquiétude, etc., il y en a eu également. Des jugements de dignitaires de l'ancien régime, il y en a eu et il y en aura d'autres.
Au final, après près de cinq mois de balbutiements, de tergiversations, de remises en cause, de grèves, de sit-in, de rencontres, de négociations, la révolution semble avoir résolument pris le chemin de la démocratie, du multipartisme et du progrès économique et social. Le gouvernement actuel de transition chargé de mener le pays vers le changement tant souhaité par tout le monde est arrivé non sans difficulté à rallier avec un large consensus les principaux acteurs de la société, à savoir la majorité des partis politiques, reconnus ou créés pour la plupart au lendemain du 14 Janvier, les organisations sociales et professionnelles, les représentants des régions et de la société civile, à son projet pour l'édification d'une Tunisie nouvelle.
La feuille de route de ce grand chantier peut être résumé aux points suivants :
- L'élection le 23 octobre 2011 d'une Assemblée nationale constituante chargée d'élaborer une nouvelle Constitution.
- La formation d'un nouveau gouvernement sur proposition de l'Assemblée constituante.
- L'organisation d'un référendum pour l'adoption de la nouvelle Constitution.
- L'organisation d'élections générales législatives et peut-être présidentielles.
- La Constitution de la première Assemblée nationale et du premier gouvernement de l'ère post-révolutionnaire.
La communauté internationale, consciente de l'impact positif d'un printemps arabe sur l'évolution de la planète, a décidé, par la mise en place d'un "plan Marshall", d'apporter son appui aux programmes de redressement des économies tunisienne et égyptienne.
Les quatre mois qui nous séparent de ce premier grand rendez-vous devront être mis à profit, gouvernement de transition et tous les intervenants dans la vie de la société, pour créer les meilleures conditions possibles à l'avènement d'une Tunisie nouvelle.
Il y a lieu de rappeler ici que les problèmes auxquels fait face le pays ne seront pas réglés du jour au lendemain par une quelconque baguette magique. Il ne s'agit pas de revendiquer tous azimuts. Le peuple tunisien a besoin de patience, de détermination, d'abnégation dans son long combat pour la construction d'une société démocratique et solidaire. Evitons de céder au " maximalisme" borné qui ne peut que profiter aux ennemis de la révolution et pensons surtout à cette jeunesse, fer de lance de la révolution, appelée demain à prendre en main les destinées du pays.
La Tunisie, disons le haut et fort, ne peut pas ne pas réussir son rendez-vous avec l'Histoire. Pour avoir donné le signal d'une profonde mutation en cours des sociétés arabo-africaines, pour avoir gagné la sympathie et obtenu le soutien de tous les peuples du monde à sa juste cause, elle se doit de servir d'exemple.
Des gens sont morts pour la bonne cause, des peuples sont un peu partout en lutte pour un monde meilleur, notamment le peuple libyen, que nous devons soutenir de toutes nos forces. Pour cela, nous ne devons ménager aucun effort pour en finir avec l'autocratie, l'arbitraire et l'injustice sous toutes ses formes.
La date du 14 Janvier sera dorénavant célébrée comme étant la fête de la révolution et de la jeunesse. C'est là tout un symbole. Parce que la révolution est un patrimoine de l'humanité, parce que la jeunesse est l'avenir de l'humanité, à nous de tout faire pour que vive toujours le 14 Janvier 2011.


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