Par Mohamed Ali BENJEMIA Je suis un salafiste, je ne porte pas de barbe et je me rase tous les matins. Ma référence est le Prophète de l'Islam, qui n'a pas hésité à faire la prière avec les Arabes Chrétiens de Najran et qui a, et c'est une gageure pour l'époque, élaboré une constitution civile, dite la Constitution de Médine, régissant des rapports harmonieux entre Musulmans, Chrétiens et Juifs, et qui a signé le document, tout simplement, Mohamed Ben Abdallah, sans référence à sa qualité de Prophète. Ma référence est le courant Mutazalite qui a su concilier rationalité et croyance. Ma référence ce sont les califes Omeyyades et Abbassides qui présidaient des débats entre Musulmans, Chrétiens, Juifs, Sabéens et Mazdéens, chacun défendant en toute liberté son point de vue. Ma référence est le Calife abbasside Al-Mamoun qui a ordonné la traduction des œuvres des philosophes grecs, traduction qui a servi à analyser et à critiquer ces œuvres par Avicenne, Ibn Rochd et bien d'autres, et qui a permis de transmettre au reste du monde ces œuvres qui ont enrichi le patrimoine mondial avec les critiques et interprétations y afférentes. Ma référence est le Grand mufti de Turquie Al-Djammali, Arabe de Syrie, qui a osé s'opposer en 1516 au terrible Sultan Selim 1er qui voulait islamiser de force les Chrétiens des Balkans, et ce, à grand renfort de citations tirées du Coran et de la Sunna, ainsi que des exemples donnés par les premiers grands califes. Ma référence ce sont Al-Boustani et Ibn El Arabi qui déclarait : «L'Amour est ma religion et ma croyance». Je n'oublie pas ceux qui, étrangers à ma race, ont enrichi l'humanité de leurs œuvres, J.J. Rousseau, Proudhon, André Malraux et bien d'autres. Comme les Japonais au 19e siècle, les nôtres qui nous ont précédés ont pris le meilleur des civilisations anciennes, ils ont enrichi ce qu'ils ont puisé et instauré pendant des siècles une civilisation qui a brillé de mille feux. Je suis un salafiste, je ne porte pas de barbe et je me rase tous les matins… M.A.B. (Carthage)