«L'Orient possède cette sagesse suprême, celle de faire cohabiter l'ancien et le moderne, l'ordre et le désordre, le continu et le discontinu, avec infiniment plus de liberté et de talent que ne peut se le permettre l'Occident». C'est de ce postulat que partiront les auteurs de ce dernier ouvrage coédité par les éditions Déméter et les éditions de L'éclat:Tunis, l'Orient de la modernité, que signe Charles Bilas et que met en image Thomas Bilange. Les Editions Déméter n'éditent pas beaucoup, mais toujours judicieusement, et à bon escient. Cet ouvrage sur le Tunis colonial allait enfin nous sortir d'une nostalgie orientaliste qui peinait à s'effacer.Car le ton et le propos sont donnés dès l'a priori: «On semble vivre à Tunis dans la trépidation de l'instant présent, celui-là même qui est déjà enfui au moment où l'on s'évertue à le coucher sur papier. Tunis est tout sauf une ville-musée. C'est un organisme vivant». C'est donc sous cet angle, et uniquement celui-ci, que se fera cette redécouverte de Tunis dont le nom antique signifiait, le saviez- vous, le bivouac, l'étape. Ce qui impliquait déjà l'idée du mouvement, de l'évolution. «L'évolution de Tunis à travers ses quartiers», «L'influence européenne dans l'architecture tunisoise du XIXe siècle», «La belle époque», «L'expansion de la ville moderne durant l'entre-deux-guerres», et enfin «Les années 40, 50:reconstruction et modernité»: une passionnante aventure architecturale qui nous mène de l'éclectisme au style international, en passant par Art Nouveau, Art Déco et Orientalisme refondus dans une synthèse originale que l'on appela Arabisance, et qui est spécifiquement et exclusivement tunisienne. La section de temps pour cette étude n'est pas fortuite : elle correspond à une époque féconde, et de grande créativité. Elle correspond également à une période très riche de l'Histoire.Et l'architecture s'en est fait le fidèle reflet. Un bel ouvrage qui a pour vocation naturelle de devenir un livre de référence.