Par Faouzia MEZZI Toutes proportions gardées, la Foire internationale du livre de Tunis assure un rôle prépondérant dans la promotion du livre non seulement en tant que tel, mais bien plus dans une optique multiple. Tout d'abord et comme son nom l'indique, la foire est un moment fort d'exposition, un marché de la production éditoriale qui, rien que pour une seule édition, en l'occurrence la 28e, rassemble plus de trois cents exposants. L'enjeu de ce rassemblement profite sans doute au livre tunisien qui acquiert pour ainsi dire une meilleure visibilité. N'oublions pas que le livre tunisien jouit d'un soutien substantiel de l'Etat tant au niveau de l'acquisition du papier qu'à celui de l'exonération des frais de transport à l'occasion de sa participation aux manifestations internationales. Par ricochet, la protection des droits d'auteur lui profite également ainsi que la disposition en faveur de la disponibilité accordée aux auteurs postulant à un congé pour la création. La foire du livre représente, par conséquent, l'opportunité d'une valorisation des fruits de l'effort et des pouvoirs publics et des créateurs. Elle renforce, en outre, la démarche des mêmes pouvoirs publics, en ce qui concerne la motivation à la lecture et le dispositif des bibliothèques publiques qui tisse, en toile de fond, la politique globale de la lecture et du livre. Au gré de son parcours, cette démarche n'ayant pas assuré un rythme soutenu, la décision présidentielle ordonnant une consultation nationale sur le livre et la lecture pour l'année 2009 a été l'occasion de réfléchir sur ses difficultés et des solutions envisageables. Là aussi, la foire du livre, en tant que réceptacle de ces mutations dans la conception du livre, de ses problèmes et perspectives, s'est impliquée dans cette dynamique réflexive. Du coup, c'est un autre rôle qui est conféré à cette manifestation : le débat sur la condition du livre et sur les questions afférentes, à savoir la création, l'édition, la diffusion, la réception par les publics. La prestation de la foire, à ce propos, entamée depuis quelques années, semble s'affirmer, au gré des sessions. Elle se conçoit dans la perspective d'une véritable proximité, dans une double stratification. D'abord au niveau de la connaissance maîtrisée des préoccupations esthétiques et thématiques de la production éditoriale et dans le monde. Et ensuite par la prospection des questions relatives à la réception, par les publics, de cette production. Autant dire que c'est au sein de la foire de Tunis qu'ont été posées, ces dernières années, des questions aussi cuisantes que celles de l'extrémisme, du terrorisme, de la démocratie, des voies de la création littéraire… En amont, les instances organisées par la foire ont mis face à face auteurs, critiques et lecteurs. N'est-ce pas formidable de rencontrer, dans le partage, dans l'échange et parfois dans la confidence, des auteurs qui, tour à tour, nous émerveillent, nous provoquent, s'immiscent dans notre jardin secret, se jouent de nous, nous manipulent‑? N'est-ce pas un défi, encore possible, à l'anonymat et à la standardisation, ces autres défis au livre en papier‑? Sans doute, ces plaisirs promis par la foire du livre de Tunis font son charme et lui valent la remarquable affluence des visiteurs. Pour revenir aux stands, demeure la sempiternelle frustration de ne pouvoir acquérir certains titres pour les bourses moyennes et parfois même pour les autres…