A l'entrée du Parc des expositions du Kram, c'est plus une atmosphère de festival qu'une ambiance de foire du livre. Dans l'enceinte de l'espace, des familles se relaxent, des couples, des étudiants, par groupes, se prélassent sous un soleil adouci par la brise des après-midi du mois d'avril... Un peu plus loin, des jeunes, "hauts comme trois pommes",ont déjà déballé des jeux éducatifs que leurs parents venaient à peine de payer " rubis sur l'ongle "? En tout cas, c'est ce que relève une jeune maman. A la question de savoir si les prix étaient plus chers à la foire, elle précise ne pas le savoir et qu'en revanche, elle tenait à acheter ces jeux pour son fils au sein même de la foire. Question d'imprégner son fils d'une tradition, d'un réflexe dont elle espère qu'il le cultivera... Si de nombreux autres visiteurs partagent cette attitude, d'autres encore ne cachent pas leur déception. D'aucuns parmi eux déplorent les prix excessifs des livres, certains autres s'arrêtent sur ce qui pourrait sembler un détail: la pollution sonore qui obnubile l'ambiance de la foire. Ceci en ce qui concerne les visiteurs des différents stands. Du côté des usagers des activités réflexives (colloques, rencontres, dédicaces d'ouvrages de grands auteurs, tables rondes...), sont relevées de nombreuses défaillances, essentiellement au niveau des horaires. Certains rendez-vous sont assez souvent reportés, sans que cela soit accompagné d'une information consécutive. Heureusement, les stands sont là qui occupent le temps mort et compensent, ne serait-ce qu'à travers la visite, la déception de louper un partage avec des intellectuels ou un auteur. Quelques pas vers la première halle vous mettent nez à nez devant un espace d'animation pour enfants, accompagné d'une musique tonitruante. Un autre son de musique impersonnelle, rythmée à outrance, vient parachever l'irritabilité des enfants contrariés chialant devant un jeu qu'il ne peuvent acquérir... Suggestion: envisager un espace spécialement conçu pour les activités ciblant les enfants. "Bidoun moujamala, wallahi" Commence ensuite le défilé des stands. La visite est toujours animée par le son étrangement polyphonique diffusé tous azimuts. Les exposants, dont le nombre atteint pour cette 28e édition les 1.380 éditeurs, semblent plutôt satisfaits de l'organisation de la foire. Certains la comparant avec d'autres foires telles que celle de Paris, la jugent plus fournie, plus diversifiée et surtout "distinguée par la qualité des rencontres, des colloques et des débats qu'elle suscite autour de l'édition, du livre, de la lecture, mais aussi autour des questions intellectuelles les plus pointues". Comme l'a souligné ce monsieur posté à l'accueil du stand d'une maison d'édition saoudienne, et d'ajouter‑: "Bidoun moujamala, wallahi...". Est-ce l'avis de cet autre monsieur qui , captant l'entretien, traîne le pas pour participer à ce qu'il a appelé "sondage d'opinion". Soit.Que pensez-vous de la foire? Il ne se fait donc pas prier et se lance dans une complainte à propos des prix excessifs des livres, notamment les livres de qualité‑:"C'est à croire qu'il faut acquérir un prêt avant de venir s'approvisionner à la foire‑!". Du coup, d'autres visiteurs arrivent et se bousculent pour prendre la parole, non sans un certain scepticisme‑: "Est-ce que vous allez reproduire nos déclarations dans leur intégralité ou allez-vous les charcuter‑?". En substance, pourtant, aucune de ces "déclarations" n'était potentiellement "charcutable"… Opinions variant entre "l'organisation hésitante de la foire" et "la surcharge des activités parallèles aussi bien pour adultes que pour enfants" ou encore "l'absence d'un espace récréatif isolé pour enfants". Au gré de la visite, certains stands sont conçus dans un encombrement qui jure avec le raffinement, d'autres, conçus dans un design digne de de sa majesté le livre, réceptacle de valeurs intellectuelles, mais aussi de valeurs esthétiques. Dans ce fatras d'appréciations impressionnistes, peut-être "conditionnées" par la présence du médiateur, une vérité demeure déductible‑: la Foire internationale du livre est gérée avec beaucoup de mérite. Elle se présente comme un rendez-vous attendu par une population de plus en plus croissante qui, cette année, a atteint les trois cent mille visiteurs. Au prix de quelques réajustements, d'un fignolage, son impact n'en sera que plus efficient.