La réponse est dans la question et les 13 écrivains spécialisés, qui ont mené cette étude sur plus de trois années, dont deux sous Ben Ali, ont dû jongler avec les interdits et les menaces pour développer leur réflexion hors des scories du régime despotique. «Tunisie 2040 — Le renouvellement du projet moderniste» est un livre de 550 pages démarré à l'initiative de Habib Guiza et de l'Association Mohamed-Ali qu'il préside, en tant que projet de recherche prospective. Et pour qu'il soit et puisse se développer, il a fallu l'appui des Américains du MEPI, celui de l'ambassadrice de Finlande, celui de la fondation allemande Friedrich-Ebert et celui de l'Institut français de coopération. Hier, au Mechtel, les auteurs étaient tous là autour de Habib Guiza, le syndicaliste achouriste du 26 janvier devenu pionnier du plurisyndicalisme. Et, en présence de M. Béji Caïd Essebsi, ex-Premier ministre de la première transition démocratique, de M. Sahbi Atig, porte-parole du groupe parlementaire d'Ennahdha au sein de la Constituante, de M. Néjib Chebbi, de M. Chedly Ayari, de M. Noureddine Hached, de M. Abderrahmen Tlili, de M. Mohamed Shimi, de M. Mohamed Jegham, de M. Taïeb Zahar, de M. Lazhar Akremi… Ainsi que Son Excellence l'ambassadrice de Finlande et Mme Elisabeth Braun, représentante de la fondation Friederich Ebert en Tunisie. Introduit admirablement par l'ancien ministre Ahmed Ouanaïes, le livre est né d'une discussion entre Guiza et Mahmoud Ben Romdhane, puis d'une volonté de bilan quant aux perspectives du projet moderniste sous Ben Ali. En prenant le soin de ménager la forme en «s'adressant à la société civile et non à l'Etat». Il en est sorti 10 chapitres qui se complètent et s'harmonisent comme un diagnostic médical sous le stéto d'un interniste. «Penser le projet moderniste tunisien» ouvre le bal avec Abdelkader Zghal, suivi d'une définition du concept «la modernité tunisienne» sous la plume de Tahar Benguiza. Abdelmajid Charfi aborde «la culture» sous tous les angles. Mahmoud Ben Romdhane, dans sa spécialité, traite de «développement économique et institutions» avec en prime les deux scénarios possibles pour 2040. Amor Belhédi s'occupe de «la question spatiale» et nous livre les trois enjeux : territorial, temporel et institutionnel. Et ils se mettront à trois pour traiter du «développement durable» : Karim Ben Mustapha, Mustapha El Haddad et Samir Meddeb. Quand à Ahmed Ounaïes, il s'en tiendra à son violon d'Ingres «les relations internationales», laissant à Abdelkrim Hizaoui le sien propre sous l'intitulé : «le rôle des médias». Enfin, Mongi Tarchouna traite de la «modernisation du système de relations professionnelles». Un livre passionnant qui vous tient en haleine bien que la révolution qu'il semblait prôner ait déjà eu lieu en dehors de lui. Reste à en préciser le ou les contenus. En généralisant le débat contradictoire dans un esprit de réconciliation et d'unité nationales.