• Des salafistes se manifestent à La Goulette Le jour J tant attendu est, enfin, arrivé. Les candidats des différentes sections (lettres, mathématiques, sciences expérimentales, économie et gestion, informatique, technique) se sont rendus tôt hier matin à leurs établissements respectifs pour passer la première épreuve de la session principale du baccalauréat : la philosophie. Les candidats de toutes les sections ont eu droit à des sujets classiques sans surprise : l'Etat, le modèle scientifique et la découverte de la vérité, la mondialisation et l'identité nationale... A l'établissement secondaire de La Marsa Erriadh, Maamoun Sdiri, candidat libre âgé de 19 ans de la section lettres, a opté pour le texte sur l'Etat, un thème qu'il a bien préparé pendant la période de révision qui a précédé l'examen du baccalauréat. Le candidat a suivi une démarche bien précise en commençant par définir le concept d'Etat et en expliquant la relation existant entre la justice et l'Etat. Il a, ensuite, disserté sur les fondements d'un Etat juste, à la lumière des différentes théories philosophiques. «Il s'agit d'un thème classique qui revient souvent dans les épreuves nationales de philosophie au baccalauréat. Je l'ai bien préparé», note-t-il, satisfait. Adossées au portail de l'établissement, Asma et Mariem devisent sur le sujet qu'elles ont choisi, à savoir l'identité nationale et son rapport à la mondialisation. Doit-on privilégier l'ouverture à autrui, au risque d'adopter les pratiques sociales et culturelles des autres ou au contraire préférer le repli sur soi, afin de protéger ses spécificités ?Parce que la mondialisation dissout les identités nationales au sein d'une identité planétaire, il est nécessaire que chaque Etat se protège de cette uniformisation des cultures et des identités qui a tendance à se généraliser. «Doit-on être un citoyen du monde ou plutôt être différent des autres ? Faut-il se ressembler ou être divergents en préservant sa propre identité et sa spécificité culturelle et sociale ? C'est cette problématique que j'ai développée, relève l'une des candidates. Je pense avoir bien passé l'examen». Les candidats des sections Economie, Mathématiques, sciences, Informatique et Technique ont également planché, hier, sur l'épreuve de philosophie qui a duré trois heures. Au lycée de La Marsa Erriadh, le directeur est venu, tôt le matin, pour vérifier si les salles ont été apprêtées comme il faut pour les examens. Ce dernier se félicite qu'aucun accrochage ne soit survenu au cours du déroulement de l'épreuve. «Espérons que les prochains jours se déroulent sans anicroche». L'examen de philosophie était également à la portée pour les candidats des sections mathématiques scientifiques, informatique et technique. Bac économie, Hosni Zaroui a choisi de travailler sur le thème de l'Etat, sujet classique et à la portée, qu'il a bien préparé. «J'ai hésité entre cette question et celle relative au rapport du corps à l'âme. Il s'agit d'un thème qui m'intéresse beaucoup. Certains philosophes accordent plus d'importance à l'âme plutôt qu'au corps à l'instar de Platon qui considère que l'âme et l'esprit de l'homme ne peuvent se libérer de son corps. Tant que l'homme reste dépendant et asservi à ses besoins primaires ; il lui est, par conséquent, impossible de s'engager pleinement dans une démarche spirituelle car il sera toujours préoccupé par la satisfaction de ses besoins physiques», explique ce candidat qui a obtenu une bonne moyenne au cours de l'année et qui compte sur les 25% pour décrocher le baccalauréat. Du côté du lycée 2-Mars à La Goulette, les candidats qui se sont rendus tôt le matin, accompagnés de leurs parents ont eu la mauvaise surprise de trouver un groupe de salafistes qui les attendaient de pied ferme pour les empêcher d'entrer dans l'établissement, au motif que la philosophie est une discipline qui ne devrait pas être enseignée car elle prône la négation du divin. «Nous avons eu peur, souligne Cyrine, Bac lettres. Certes, les policiers et les militaires étaient là, mais ce sont les parents des candidats qui ont discuté avec eux afin de les raisonner. Tout est ensuite rentré dans l'ordre et nous avons passé l'épreuve sans problème». La jeune candidate brillante a choisi la question portant sur les modèles scientifiques et la découverte de la vérité. Cette dernière a expliqué que les connaissances et les modèles scientifiques qui ont été établis par l'homme dans les diverses disciplines répondaient au besoin d'établir des vérités liées aux phénomènes de la nature, de les rapprocher de l'homme et de les adapter à leurs besoins. Mais les modèles scientifiques établis et les recherches entreprises n'ont pas répondu à cet objectif uniquement. Le développement de la science et de la recherche a renforcé l'hégémonie de certains Etats par rapport à d'autres en servant leurs desseins politiques et idéologiques comme l'illustre l'exemple de la bombe atomique. Yassine et Nour, deux autres candidats de la filière lettres ont préféré, quant à eux, le texte portant sur les thèmes de l'Etat et de la justice. «Il fallait expliquer les concepts de l'Etat et de la justice, ont relevé les deux candidats. Un Etat doit-il être souverain, faire régner l'ordre, imposer des lois et restreindre les libertés des individus au risque que cela conduise à l'injustice et à la violence ou est-ce que la souveraineté doit-elle émaner de la masse pour pouvoir vivre dans un Etat où la justice, l'égalité et les libertés sont les principaux mots d'ordre ? C'est la problématique que j'ai développée dans ma dissertation», a observé Nour confiante, qui prévoit, si elle obtient le fameux sésame, de suivre une formation dans la décoration d'intérieur. En début d'après-midi, les candidats ont passé les matières optionnelles puis ont repris le chemin de la maison, pour se reposer et réviser la matière principale programmée pour le second jour, à savoir les mathématiques pour les candidats de la section maths, les sciences pour les candidats de la section sciences expérimentales et l'économie pour les candidats de la section économie et gestion. Quant aux candidats de la section lettres, ils passeront l'épreuve de la pensée islamique.