Quel avenir pour l'Union du Maghreb Arabe (UMA) après les révolutions qu'a connues la région ? Quel type de rapport entre le politique et le civilisationnel dans la construction maghrébine ? Et que pourraient-être les menaces guettant l'UMA par les temps qui courent ? Autour de ces questions, s'est articulée la première séance de la rencontre organisée hier au siège des Archives nationales à Tunis par l'Association de recherches et d'études sur l'UMA. Intitulée « Une nouvelle vision pour la construction du Maghreb Arabe : scénarios et paris », cette rencontre, qui s'est achevée hier, a permis de revenir sur les raisons de l'échec accusé par l'institution maghrébine des années durant, pour avancer par la suite les menaces de plus en plus pesantes et les issues possibles. Dans son intervention «La dialectique du politique et du civilisationnel dans la construction maghrébine », le professeur Ahmed Jeddi de l'Université de la Manouba a noté que l'Union du Maghreb Arabe était un projet mort-né, étant une entreprise politique à la fois empreinte de difficultés et dépourvue de vision civilisationnelle commune. Le même intervenant a ensuite fait remarquer que la faiblesse du partenariat économique, culturel et civilisationnel entre les pays du Maghreb Arabe témoigne de l'inefficacité de ce projet politique affaibli par les divisions. Lesquelles divisions, a-t-il signalé, sont toujours d'actualité, à commencer par la question du Sahara occidental opposant l'Algérie et le Maroc. Le conférencier a également attiré l'attention quant à la nécessité de s'adapter aux mutations géostratégiques que connaît le monde d'aujourd'hui appelant à mieux gérer les différends et litiges troublant les relations entre les pays du Grand Maghreb. Ce qui permettra selon lui de donner naissance à une Union maghrébine capable, tout comme l'Union européenne, de faire face au reste des pôles politiques et économiques mondiaux. Le rêve d'une Union maghrébine beaucoup plus effective que formelle hante également le professeur Ali Amor Hazel du Centre libyen des manuscrits. Lui, qui pense que les dictatures arabes renversées ont été à l'origine de la longue léthargie de l'UMA, parie sur les jeunes générations pour relever les défis qui se présentent devant l'institution d'un Grand Maghreb uni et solidaire. « Tout est à recommencer. Il faut inculquer aux jeunes générations l'importance qu'il y a à fédérer les peuples du Maghreb Arabe qui se partagent la même religion et les mêmes spécificités civilisationnelles. Les facteurs économique et culturel pourraient réussir là où la politique a échoué. Cela dit, il faut restructurer l'éducation dans tous les pays maghrébins de manière à servir les nouvelles orientations pour l'instauration d' un vrai partenariat maghrébin ». Le rêve d'une Union maghrébine solide et efficace est néanmoins confronté aujourd'hui à plusieurs menaces. Des menaces que le professeur Amor Farhati de l'Université Mohamed Khidher de Biskra (Algérie) rattache étroitement à la propagation du « terrorisme » vers la Libye et la Tunisie après avoir été restreint en Algérie et au Maroc. Il met aussi en cause la présence progressive d'armes lourdes dans la région maghrébine après la chute du régime de Mouammar Kadhafi et affiche une crainte permanente face à la multiplication de la consommation et du commerce de drogues dans la région : « Réalisez-vous que 27 % des stupéfiants saisis en Europe et dans le monde sont d'origine maghrébine ? Ajoutons à cela le crime organisé de plus en plus croissant dans la région et l'immigration clandestine qui ne cesse de croître compte tenu de l'affluence des Africains vers une région considérée comme un trait d'union entre l'Afrique et l'Occident. Toutes ces menaces pèsent lourd constituant un handicap devant la constitution d'un Grand Maghreb fort politiquement et économiquement. D'où la nécessité de s'y pencher sérieusement ».