• Les entreprises qui évoluent sur la base d'études détaillées et de la technicité des ressources humaines poursuivront leur activité dans des conditions normales. • Les entreprises qui ont été créées dans la perspective de bénéficier de privilèges personnels, de manœuvres frauduleuses ou de passe-droits, et qui dépendent principalement de leurs propriétaires sont vouées à l'échec. L'entreprise confisquée est un nouvel acteur dans le tissu économique national. Certes, le changement de statut aura un impact direct sur l'entreprise, notamment sur son équilibre financier, mais aussi sur tous les opérateurs du secteur. D'autant plus que le spectre des entreprises s'étend sur tous les secteurs et les filières d'activités et que ces unités seront, ultérieurement, rachetées par de nouveaux investisseurs, voire leurs concurrents. Certains parlent du sauvetage de ces entreprises, d'autres appellent à la valorisation de ces unités, sans oublier ceux qui dressent des scénarios mafieux; en somme, la situation des entreprises confisquées est problématiques à plus d'un titre. Pour une meilleure évaluation des répercussions et les risques inhérents à cette démarche, on a contacté un expert-comptable qui a répondu à plusieurs interrogations portant sur la situation financière et organisationnelle de ces entreprises. L'expert a souligné que l'analyse dépend de la nature de l'entreprise, des résultats réalisés et du poids de ses ex-propriétaires dans la réalisation de ses performances. On distingue à cet égard, les entreprises qui fonctionnent indépendamment des propriétaires, les entreprises dont l'activité est réduite à un seul marché, d'autres qui ouvrent par les facilités de caisse ou encore les entreprises coquilles qui servent de passerelles pour spolier des biens immobiliers et finalement les sociétés écran. S'agissant des entreprises d'envergure, ou la nature de l'activité, la taille et le positionnement sur le marché sont favorables à la réalisation de bonnes performances, la situation est relativement stable, voire encourageante pour certaines sociétés. Mieux encore, «même si certaines ont connu des fléchissements de la valeur boursière, à l'instar de la société Ennaki, la reprise n'a pas tardé», rappelle l'expert. En effet, l'activité de ces entreprises a montré des signes de relance pour les investisseurs. «Donc, avec une bonne gestion, on n'a pas à s'inquiéter pour ces entreprises», résume-t-il. De même, pour les entreprises qui occupent une place privilégiée sur le marché, notamment de monopole ou de bi-pôle, sont à l'abri de tout scénario catastrophe. Les entreprises qui évoluent sur la base d'études détaillées et de la technicité de ces ressources humaines poursuivront leur activité dans des conditions normales. Quoique la nomination d'administrateurs judicaires ne soit pas toujours compatible avec les besoins de l'exploitation, notamment en matière de célérité des décisions. Pis, l'expert dénonce que plusieurs personnes reconnues pour leurs liens étroits avec l'ancien régime et de la famille du président continuent à diriger et à contrôler certaines des grosses boîtes confisquées. «L'administrateur judicaire de l'une des imminentes entreprises de Belhassen Trabelsi, dans le domaine de l'agroalimentaire, n'est autre que son bras droit qui lui a préparé, auparavant, plusieurs dossiers de création ou de rachat d'entreprise», indique-t-il. Et d'ajouter: «Le commissaire aux compte de l'une des entreprises a participé activement à aménager la privatisation des entreprises en difficulté ». Par contre, les entreprises qui ont été créées dans la perspective de bénéficier de privilèges personnels, de manœuvres frauduleuses ou de passe-droits, et qui dépendent principalement de leurs propriétaires sont vouées à l'échec. En effet, le départ de leurs patrons engendre leur disparition. A ce titre, plusieurs entreprises ont été créées pour bénéficier d'un seul marché. «L'annulation de ce marché accordé dans des conditions suspectes entraîne la cessation de l'activité de l'entreprise», explique-t-il. Idem pour d'autres entreprises dites «coquilles», principalement de promotion immobilière, qui ont été lancées pour spolier les biens immobiliers. Pour toutes ces entreprises, le risque de la faillite est alimenté par deux facteurs, à savoir la dégradation du chiffre d'affaires ou la réticence des bailleurs de fonds, notamment les banquiers. Dans les deux cas, incapable de satisfaire les exigences de ses créanciers, l'entreprise serait liquidée par le syndic de la faillite pour répondre aux revendications des fournisseurs et des employés. La confiscation, selon l'expert, est un mécanisme nécessaire pour redresser la barre dans plusieurs secteurs concurrentiels. Mieux encore, ce processus mérite des perfectionnements pour éviter des dérapages, à l'instar de ce qui s'est passé lors de la privatisation des entreprises publiques. A cet égard, il insiste sur l'évaluation des entreprises à leurs justes valeurs. Pour ce faire, «il est inconcevable qu'une seule boîte se charge de l'évaluation d'une entreprise confisquée», s'exclame-t-il. Concevoir des cahiers de charges sur mesure serait un crime contre l'économie tunisienne, voire contre tout un peuple.