«L'homogénéité relative du peuple tunisien nous rappelle encore plus la nécessité de respecter nos minorités». C'est en ces termes que Ghazi Ghraïri, expert en droit constitutionnel, a débuté son intervention lors de la table ronde organisée lundi soir à Tunis par l'Association tunisienne de soutien aux minorités (Atsm) sous le titre «Les droits culturels des minorités». Mais de quelles minorités parle-t-on en Tunisie ? Nous avons posé la question à Mlle Yamina Thabet, présidente de l'association. Pour elle, les minorités à soutenir sont les minorités religieuses et spirituelles (juifs, chrétiens, bahaistes...), les minorités «non religieuses» (athées, agnostiques...), les minorités culturelles (Amazigh...) et les minorités ayant des orientations sexuelles particulières (homosexuels...). De l'avis de Ghazi Ghraïri, les projets et les échos émanant des commissions chargées de la rédaction de la constitution ne sont pas satisfaisants pour les minorités dont les droits sont souvent confisqués par l'emploi de notions «fourre-tout» telles que «le respect des mœurs» ou le «trouble à l'ordre public» qui permettent tous les abus. L'orateur insiste également sur le fait que des textes de loi bien rédigés ne sauraient à eux seuls garantir les droits des minorités. L'éducation de la société au respect des différences est primordiale, car la loi doit être l'écho de la société et non l'inverse. Venu apporter son soutien à l'Atsm au nom de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, Abdessattar Moussa n'a fait qu'effleurer de façon très vague la question des minorités, préférant se contenter de parler des droits de l'Homme et des libertés en général, refusant même de répondre à une question posée sur le droit des homosexuels. Parmi les présents à cette table ronde, nous avons noté la présence de. Jaouhar Ben Mbarek, coordinateur général du réseau Doustourouna (le seul homme politique présent), avec qui nous avons eu un bref entretien dans lequel il estime que les minorités sont réellement menacées en Tunisie si l'on en juge par les travaux de la commission chargée de rédiger le chapitre des droits et des libertés au sein de la Constituante. En effet, il juge que l'article fondamental sur la non-discrimination est très mal rédigé et occulte de façon délibérée la question de la religion, de la race et de la couleur de peau à titre d'exemple. Notons au passage que la table ronde a connu deux moments forts, à savoir l'intervention concernant la souffrance au quotidien des sourds-muets dont 70% sont analphabètes en raison d'un système éducatif qui ne reconnaît pas leur handicap. Le deuxième temps fort c'est sans doute une attitude qui révèle que l'Atsm a du pain sur la planche, celle d'une femme (non tunisienne) qui a claqué la porte de la table ronde en criant au scandale et en proférant des propos jugés par l'assistance antisémites, après avoir écouté l'intervention d'une participante qui a estimé qu'il est inadmissible que la loi interdise aux non-musulmans de se présenter aux élections.