Il est l'un des humoristes les plus populaires en France. D'origine marocaine, il s'est produit, jeudi dernier, sur la scène du théâtre romain de Carthage, archicomble. Avec beaucoup d'humour, Jamel Debbouz est venu nous raconter son histoire, sa vie, son parcours professionnel et personnel. Il s'agissait, en fait, de son dernier one man show, intitulé «Tout sur Jamel», qu'il présentait pour la première fois en Tunisie. Mais avant la montée du célèbre artiste sur la majestueuse scène de Carthage, ce fut au jeune comédien Malik Ben Tara (il a fait sa première apparition dans «Jamel Comédie Club») de nous offrir une prestation de trente minutes, abordant des thèmes et des réflexions sur les rapports humains, l'amour, la politique, les médias.... Dans une gestuelle habile et grâce à un jeu de mots fort étudié, cet humoriste, qui est en train de monter en flèche, a réussi à capter l'intérêt du public et à le faire rire aux éclats. Puis ce fut le tour du grand (malgré sa petite taille) Debbouz de nous résumer, pendant près de deux heures, son parcours de comédien, d'enfant et d'homme : de l'école, à la profession, à la création de «Jamel Comédie Club», à la rencontre amoureuse jusqu'au mariage. Il nous a, ainsi, fait rire aux éclats avec des histoires de famille et des anecdotes de la vie quotidienne qui, marquées de sa touche spécifique et inimitable, deviennent des témoignages qui parlent de et à tout être, de et à chacun de nous. Ce faisant, le comédien n'a pas oublié de saluer, au passage, le courage du peuple tunisien :« Je suis fier d'être en Tunisie, vous étiez un exemple et vous avez donné une leçon au monde entier», répétait-il de temps à autre, en improvisant des scènes qui tournent en dérision certains comportements typiques des citoyens tunisiens, leur manière de parler et leurs intonations distinctives. Usant de tout son talent d'imitateur qu'il a allié à une gestuelle parfaitement caricaturale, Jamel Debbouz a merveilleusement réussi à nous entraîner dans des scènes faites d'humour — parfois noir — et d'ironie qui montrent, malgré tout, le côté vivant et drôle de la vie. Insérant, souvent, au passage, l'essentiel dans le secondaire qui n'est que prétexte, il n'a, à titre d'exemple, rapporté ses débuts au théâtre que pour aborder des problèmes d'actualité qui existent autant en France que dans le monde arabe. Créant des situations nourries de sarcasme à la limite du cynisme, il parlait au fond de sujets sérieux, invitant son auditoire à réfléchir sur l'immigration, le racisme, la religion, le fanatisme..., et lançant un appel à la tolérance et à l'ouverture sur l'Autre. Dans son spectacle, Debbouz a également évoqué le choc des civilisations. Inspiré de son expérience personnelle, l'humoriste a parlé de sa famille, de ses beaux-parents, de sa femme et de son enfant Léo, nous offrant une galerie de personnages aux profils différents : du père macho, de la mère illettrée, de ses beaux- parents éduqués et snobinards... De cette opposition flagrante entre les deux familles ne peut naître qu'une divergence quant au rapport à l'éducation et à la culture, qui reflète les différences entre deux sociétés, deux civilisations, à savoir le Maroc et la France. Jamel Debbouz a, en somme, été fidèle à ce qu'on savait de lui : vivacité d'esprit, volubilité dans l'humour et le sarcasme, justesse d'une critique loin de tout propos revanchard, ouverture totale et générosité dans l'effort, un effort qui a généré, jeudi dernier, beaucoup de rires et... de la réflexion.