L'un des principaux aspects qui font la beauté, la singularité et la richesse de l'art est qu'il part de la rencontre de l'émotion et de la réflexion, un duo nécessaire pour la création artistique et pour son interprétation. Les arts sont dans ce sens complémentaires. Ils s'enrichissent réciproquement et se confrontent mutuellement. Ainsi, la peinture, la musique et la poésie ont donné au vernissage de l'exposition de l'artiste-peintre Nebil Ben Rejeb un goût particulier. Inaugurée à l'espace Ammar Dakhlaoui de la libraire Art-Libris au Kram, cette exposition se poursuit jusqu'au 29 mai. La découverte des nouvelles œuvres de l'artiste, qui tournent autour du portrait, s'est d'abord faite sous les rythmes de la délicieuse musique jouée par la troupe kélibienne dont Nebil Ben Rejeb fait partie, aux côtés de Viviane De Mul, Dhia Eddine Lemjid et Aymen Ben Youssef. Puis, c'était au tour de Noureddine Samoud de lire une sélection de ses poèmes qui évoquent la peinture. En conviant le poème et le chant à accompagner cette découverte, Nebil Ben Rejeb a su créer autour de ses œuvres un univers singulier où ses propres empreintes ne manquent pas d'apparaître. Originaire de la ville de Kelibia, ville inspiratrice à laquelle on doit de nombreux artistes dans toutes les disciplines de l'art, il a débuté sa carrière en créant des collages qui ont fait sa réputation. «Presque tous ont été vendus, dans des expositions entre la Tunisie et l'étranger», nous confit-il. Il s'est ensuite tourné vers le figuratif, par des peintures à l'huile en grand format avant de se consacrer, ces 15 dernières années, à l'abstrait, une expérience qu'il a partagé avec «les Kélibiens de l'abstrait», ses amis artistes Raouf Gara et Abdelmajid Jenhani qui ont assisté au vernissage. Dans ses précédentes œuvres, Nebil Ben Rejeb a cultivé un style audacieux et des couleurs franches. Avec sa nouvelle série de peintures à l'encre de chine, il fait face à un principal questionnement : «Comment peut-on entamer le portrait ?». Ce retour au figuratif s'attaque donc au cœur de ce style artistique. Un retour que l'artiste considère comme une période de pause. A voir ses dernières œuvres, nous avons l'impression qu'elles ont toutes un point commun, un fil conducteur : elles ressemblent à l'artiste dans le sens où son questionnement sur le portrait est peut-être une interrogation sur lui-même, une recherche de soi qui se projette sur la toile. Ce qui nous ramène à une autre question récurrente dans le monde de la peinture: «Le peintre ne se peindrait-il pas lui-même ?».