De nouvelles révélations de l'enquête sur l'assaut de l'ambassade US donnent à penser que le bras de fer a bel et bien commencé entre les deux parties. Un certain Abou Iyadh est passé par là... «Mine de rien, nous allons dare dare vers une confrontation directe entre Ennahdha et les salafistes», parient plus d'une source proche de l'enquête menée sur les péripéties de l'assaut de l'ambassade US lancé vendredi dernier. En effet, à l'opposé des autorités compétentes qui ont opté pour un mutisme presque total «afin de ne pas perturber le déroulement des investigations», unanimité a été cependant faite, tant auprès de certains enquêteurs que chez plusieurs experts en matière de renseignements, sur l'implication criarde des salafistes dans ce qui est désormais appelé «le drame des Berges du Lac». Il est vrai que plus de la moitié des manifestants arrêtés, ce jour-là de triste mémoire, ont avoué leur appartenance à la nébuleuse salafiste, et plus précisément à sa branche djihadiste. D'autres parmi leurs «camarades» qui font encore de la résistance face aux enquêteurs, ne tarderont pas, à leur tour, à vider leur sac. Par ailleurs, d'autres preuves, non moins accablantes, sont venues épouser la même thèse. Citons-en notamment: 1 — La manifestation en direction de l'ambassade US est partie de la mosquée El-Fath, devenue, selon la police, l'un des terrains de prédilection des salafistes. 2 — Des caméras ayant filmé l'assaut ont clairement démontré que la majorité des manifestants sont des barbus arborant la traditionnelle tenue afghane. 3 — Les slogans lancés par les manifestants font partie du langage préféré des salafistes. La goutte qui a fait déborder le vase Pour en avoir le cœur net, il a fallu attendre la journée d'avant-hier qui dissipera tous les doutes sur ce que tramaient les salafistes. En effet, ce jour-là, leur «number one» Abou Iyadh, dans l'inévitable mosquée El Fath pleine comme un œuf, monta subitement au créneau pour donner un discours d'une rare virulence, en y faisant le procès d'Ennahdha et celui du ministre de l'Intérieur en personne, sur fond d'accusations et de défis, pour ne pas dire de menaces. Pour les nahdhaouis, c'est un peu la goutte qui a fait déborder le vase. «Ça y est, ils (les salafistes) nous déclarent la guerre», affirme l'un d'eux, après avoir souhaité garder l'anonymat. Et d'ajouter, visiblement inquiet: «Les propos de Abou Iyadh sont tellement acerbes et graves que ses mauvaises intentions, jusque-là à peine voilées, se précisent nettement. Voilà un cinglant démenti à tous ceux qui s'amusaient à accuser Ennahdha de complicité avec les salafistes». Dès lors, ce n'est plus un hasard si le QG du mouvement à Montplaisir est devenu, depuis lundi, mieux quadrillé par la police. Ce n'est pas non plus un hasard si l'aile dure du mouvement commence à faire entendre des... bruits de bottes, en prélude à la confrontation directe qui se profile de plus en plus avec les salafistes. «Jusqu'ici, nous leur avions accordé des circonstances atténuantes. Notre Cheikh (Ndlr : Rached Ghannouchi) les a reçus et longuement écoutés. Peine perdue», lance un jeune nahdhaoui qui n'hésite pas à les considérer comme «des obscurantistes illettrés qui veulent nuire à tous les Tunisiens, et pas seulement à notre mouvement qui saura, c'est juré, les mettre sous l'éteignoir». La guerre Ennahdha-salafistes a-t-elle commencé ?