Alim Qasimov, un maître reconnu et incontesté de l'art du «mugham» (maqam) azéri, était parmi nous, vendredi dernier, dans le cadre de la 7e édition de Mûsîqât. Un interprète exceptionnel à bien des égards, de par son talent inimitable mais aussi par le fait d'avoir su rendre ses lettres de noblesse à un style musical qui n'appartient pas à sa propre tradition musicale. En effet, le Mugham n'était pas connu dans sa famille et la tradition mettait, plutôt, au centre le Zorna (un chant accompagné de la Zorna, une bombarde azérie) dont le grand-père de Alim était un fameux interprète. C'est à 17 ans qu'il découvre le Mugham, sous les conseils d'une chanteuse célèbre à laquelle il livrait du lait. Il auditionna à l'opéra et passa le concours d'entrée à une grande école de Mugham à Bakou (capitale de l'Azerbaïdjan). La suite de son parcours est faite de grands prix et d'importantes tournées internationales. Pour en revenir à la soirée de vendredi dernier, disons que l'on s'attendait à ce que le public de Mûsîqât ne rate pas un rendez-vous pareil et, en effet, pour cet interprète exceptionnel, ils étaient nombreux à avoir consenti le déplacement. Habillés des couleurs de leur pays, l'artiste (au daf) et les deux jeunes musiciens qui l'accompagnaient et qui jouaient du Kâmanche (vièle à pique) et du târ (luth à long manche), nous ont interprété, en prélude, une longue suite où nous avons pu apprécier et même nous délecter des sons de ces instruments traditionnels et, bien entendu, de la voix du maître qui passait avec beaucoup d'aisance, dans le même trémolo, du grave à l'aigu. Son interprétation prenait même l'allure de la performance, tant les suites de mouvements étaient longues. Sa fille, Farghana, une très belle Azerbaïdjanaise qui a commencé à partager (chant et daf) la scène avec son papa depuis l'âge de 18 ans, finit par les rejoindre au second mugham. Et l'on a découvert que de beau, elle n'a pas que le visage, puisque sa voix, limpide et poignante, accompagnait avec une grande complicité celle de son père. Le meilleur fut pour la fin, comme l'on dit. Et dans le cas de figure, ce fut même époustouflant, grâce à un morceau vocal dramatique exécuté par la fille et son géniteur, où l'on a pu ressentir cette envolée lyrique, décortiquant avec beaucoup de maîtrise et d'émotion, le sentiment amoureux. Bravo!