La défense menace de recourir à la justice internationale Le collectif de défense des personnes arrêtées dans le cadre de l'enquête sur les incidents de l'ambassade américaine à Tunis, a appelé hier à la création d'une commission d'enquête indépendante sur la mort de Béchir El Golli. Incarcéré à la prison de Mornaguia, El Golli, 23 ans, est décédé jeudi d'un arrêt cardiaque après 54 jours d'une grève de la faim «sauvage», selon son avocat, Adelbasset Ben Mbarek. Dans une conférence de presse, le porte-parole du collectif de défense, Anouar Ouled Ali, a imputé la responsabilité de la mort d'El Golli aux ministres de la Justice et des Droits de l'homme et de la Justice transitionnelle, les exhortant «à agir d'urgence pour déterminer les causes du décès, punir les responsables ou présenter leur démission du gouvernement». Le collectif a accusé également les circonscriptions judiciaires au niveau de l'instruction, de l'accusation et du ministère public, en particulier, la direction des services pénitentiaires, estimant que «la négligence de la santé d'El Golli et le fait de ne l'avoir pas secouru malgré la grève de la faim qu'il observe sont des causes directes conduisant à sa mort». Il a rappelé que la défense avait déposé, à plusieurs reprises, des plaintes et des demandes de libération de leurs clients après la dégradation de leur santé dans la prison suite à la grève de la faim, sans obtenir de réponses. «Des centaines de personnes (300 à 400) ont été arrêtées dans le cadre de l'enquête sur les incidents de l'ambassade américaine. Quelque 128 individus en détention provisoire observent une grève de la faim depuis au moins un mois» selon la défense. Evoquant les circonstances de l'arrestation de Béchir El Golli et de Mohamed Bakhti (un autre gréviste de la faim libéré récemment et qui serait dans un état critique), le porte-parole a affirmé qu'ils ont été interpellés sur la base de rapports policiers et non pas d'actes et faits matériels, soulignant que jusqu'à présent la défense espère tenir un procès équitable mais serait contrainte de recourir à la justice internationale en l'absence d'une enquête sérieuse sur les causes du décès et la détermination des responsabilités. De son côté le ministre de la Justice, Nouredine B'hiri, a annoncé, hier, lors de la rencontre de presse périodique au palais du gouvernement à la Kasbah, l'ouverture d'une enquête judiciaire, sur la base du rapport du médecin légiste pour déterminer les causes du décès d'El Golli. Il a affirmé que les services pénitentiaires de la prison de Mornaguia et le ministère de tutelle avaient suivi l'état de santé d'El Golli qui a été, a-t-il dit, transféré à maintes reprises à l'hôpital, acceptait parfois les soins et s'y opposait par moments. La Ligue tunisienne des droits de l'Homme (Ltdh) a demandé l'ouverture d'une enquête «sérieuse et responsable» qui doit être pilotée par une instance indépendante pour déterminer les responsabilités suite au décès de Béchir El Golli. La famille refuse l'autopsie L'état de santé de Mohamed Bakhti qualifié «d'extrêmement critique» par les médecin La famille du jeune salafiste Bechir El Golli, décédé jeudi suite à une grève de la faim sauvage, a refusé l'autopsie de son fils pour déterminer les causes de son décès, a indiqué hier le ministère de la Santé dans un communiqué. Le jeune El Golli (28 ans), dont le décès a été annoncé jeudi par ses avocats, avait entamé sa grève de la faim le 25 septembre dernier, date de son arrestation suite aux incidents, mi-septembre, de l'ambassade américaine à Tunis. «Des représentants du pouvoir judiciaire ont eu une longue discussion avec les proches d'El Golli pour les convaincre de l'importance de procéder à une autopsie», a indiqué le ministère, affirmant que les membres de la famille d'El Golli ont opposé un refus ferme à la demande d'autopsie et ont signé les documents attestant de leur décision, a précisé la même source. Les médecins, cités par le communiqué du ministère de la Santé, ont par ailleurs qualifié «d'extrêmement critique» l'état de santé du deuxième gréviste de la faim, Mohamed Bakhti, arrêté fin septembre lors des incidents de l'ambassade américaine. Le jeune Bakhti, qui avait entamé une grève de la faim sauvage depuis son arrestation, est en réanimation intensive dans l'un des hôpitaux de la Capitale, précise le ministère de la Santé. Selon une source autorisée au ministère de la Santé, les deux grévistes de la faim avaient été hospitalisés à plusieurs reprises durant leur mouvement de grève mais ils avaient refusé toute intervention médicale efficace malgré les efforts déployés par l'équipe médicale et leurs proches pour les en convaincre.