Par Soufiane BEN FARHAT La nouvelle guerre israélienne contre Gaza est significative à plus d'un titre. Benyamin Netanyahu l'a engagée en étant quasi-certain de la remporter haut la main et vite. Considérations électorales obligent. Avant les élections législatives israéliennes du 22 janvier, il a voulu agir à la manière du président américain Barack Obama. Ce dernier s'était targué, à la veille d'un scrutin présidentiel serré et décisif, d'avoir éliminé Oussama Ben Laden, l'ennemi public américain numéro un. Netanyahu a voulu se vanter d'avoir éliminé le chef des opérations militaires du Hamas, Ahmad Jaabari. Lequel a été tué à Gaza par un raid de l'armée israélienne qui a lancé en même temps une vaste opération contre les militants et les civils palestiniens. En fait, Ahmad Jaabari est le plus important chef militaire palestinien à avoir été frappé par une «élimination ciblée» depuis la fin de l'offensive israélienne contre Gaza en janvier 2009. Pourtant, Jaabari était en train de négocier un accord de paix avec Israël, a révélé le quotidien électronique The Daily Beast le 15 novembre. Or, l'offensive meurtrière israélienne s'est heurtée à une vigoureuse et dévastatrice riposte palestinienne. Le Djihad islamique ainsi que les brigades Al-Qassem ont procédé à des tirs de roquettes qui ont percé le fameux dôme d'acier antimissile israélien. Le Djihad islamique a revendiqué des tirs de missile Fajr 5, tombés dans la banlieue sud de Tel Aviv et à Jérusalem, soit à plus de soixante-dix kilomètres de la bande de Gaza. Lesdits tirs attestent bien de l'accroissement de la portée des missiles dont disposent désormais les factions palestiniennes dans la bande de Gaza. L'aide de l'Iran, de la Syrie et du Hezbollah libanais aux groupes palestiniens n'a pas été vaine. Certains parlent aussi de l'arrivée dans le territoire palestinien de missiles dérobés dans les stocks libyens durant la guerre contre le régime de Kadhafi. Le Fajr 5 est une roquette d'artillerie d'une portée de 75 km, développée par l'Iran depuis une dizaine d'années. Par ailleurs, la résistance palestinienne a développé la fabrication de missiles locaux, dont les fameux AM75 qui ont la même portée que le Fajr 5, soit 75 km et sont capables d'atteindre Tel Aviv et Jérusalem. Elle dispose aussi de missiles de moindre portée comme le Nassr, pouvant atteindre un rayon de 20 à 40 km. Les multiples tirs de roquettes palestiniens (près d'un millier) ont engendré un état de choc, de peur et de psychose dans les rangs israéliens. Les images de soldats et de policiers israéliens affalés sur l'asphalte, par crainte des missiles palestiniens, ont été ravageuses. Pour la première fois depuis la guerre de 1948, Tel Aviv a été atteinte par des tirs de missiles. Pour la première fois aussi, l'équilibre de la terreur a lieu entre Israéliens et Palestiniens. Même si, en l'occurrence, le David palestinien tient la dragée haute au Goliath israélien. Et alors que d'aucuns s'attendaient au lancement d'une offensive terrestre israélienne contre Gaza, Netanyahu a fait intercéder les Egyptiens en vue de la conclusion d'un cessez-le-feu durable. En vertu de ce cessez-le-feu, les belligérants s'engageraient mutuellement à stopper les frappes et les tirs de roquettes. Le chaudron de l'histoire bout. Les seuls arguments de la force et de la supériorité technologique ne tiennent plus. Ou du moins, ils semblent fragilisés. Le plus fort ne l'emporte pas toujours. Et puis, il y a le précédent libanais et la cuisante défaite de l'armée israélienne contre quelques centaines de combattants du Hezbollah au Sud-Liban l'été 2006. Netanyahu s'avise de marcher sur les pas de Sharon, son idole inconsciente. Et l'inconscient est la réserve de la mauvaise foi. Mais le monde de Sharon n'est plus. Comme celui de Verdun ou de la canonnière à la vieille sauce coloniale. Netanyahu appartient à un autre monde. Ses calculs initiaux ont été contre-productifs. L'arroseur est arrosé. Il met de l'eau dans son vin.