Il est 15h00 à Menzel-Bourguiba. Juste en face de l'ancien siège du RCD dissous, où la municipalité et ses agents y ont trouvé refuge après que l'ancien Hôtel de Ville a pris feu le soir du 13 janvier 2011, une dizaine de jeunes salafistes se sont installés, en dessous des arcades, pour protester contre la détention des salafistes dans les geôles tunisiennes. A première vue, des banderoles en arabe nous interpellent où on pouvait lire des slogans qui font référence au vendredi 30 novembre 2012, date du début de leur sit-in et qui a été précédé d'une marche pacifique. Ces banderoles traduisent également des revendications précises : «Nous demandons l'ouverture d'une enquête pour élucider les causes du décès de Bakhti et Galbi», «Non pour le retour de la politique de l'oppression et de la dictature», «nous sommes patients, nous sommes patients jusqu'au retour du détenu», «Marzouki, Jebali, le sang du Tunisien est très cher», «Libérez le souffrant, libérez le souffrant, le peuple tunisien est en train de souffrir» et «Nous exigeons la libération des grévistes de la faim». A l'intérieur de leur campement de fortune, on pouvait apercevoir deux fauteuils, un grand sofa, des tapis et des draps pour permettre l'isolation des lieux contre le froid. Un jeune salafiste, assis à côté d'une table de sonorisation dont la tête était couverte d'un keffieh (le célèbre chèche palestinien) et couvert d'une kachabiya artisanale grise, était en train de manipuler un PC portable, muni d'une clé internet 3G où on pouvait voir sur son écran la page d'accueil de Facebook. Et à l'entrée, deux tables en plastique ont été placées où les organisateurs du sit-in ont mis à la disposition des visiteurs un livret pour l'enregistrement. A la recherche d'un porte-parole Il a fallu attendre plus d'une demi-heure pour qu'on puisse trouver un interlocuteur ou un porte-parole. Finalement, un trentenaire qu'on surnomme «Abdallah Ettounsi» (apparemment le leader du groupuscule de jeunes salafistes), nous a accueilli chaleureusement sous un regard méfiant d'un autre jeune salafiste qui tenait un appareil photo compact dans le but d'enregistrer notre entretien et de le poster par la suite sur les réseaux sociaux. Selon «Abdallah Ettounsi», ce sit-in est un mouvement de soutien aux détenus salafistes qui ont entamé une grève de la faim suite aux arrestations liées aux événements d'El Abdellia, du film Persepolis diffusé par Nessma et de l'ambassade américaine à Tunis. Toujours selon le porte-parole de ce groupe, parmi les détenus de la mouvance salafiste, il existe deux jeunes de la région de Bizerte : Haythem El Mejri et Haythem El Salmi. Toutefois, il affirme son «soutien à tous les détenus salafistes sans exception et à tous ceux qui sont en grève de la faim. Nous sommes contre le régionalisme. Cela fait 5 jours que nous avons entamé ce sit-in. Pour le moment, nous avons reçu la visite de plusieurs personnes, à l'instar de Jamel Bouaâjaja, l'élu de la région à l'Assemblée nationale constituante et représentant du parti Ennahdha, et de plusieurs membres de la société civile. Même le délégué de Menzel-Bourguiba nous a envoyé un émissaire pour prendre note de nos attentes. Tant que nos frères ne seront pas libérés, nous allons poursuivre ce sit-in. Et s'il le faut, nous sommes prêts à entamer une grève de la faim. Ce n'est qu'un début et nous allons continuer ce combat jusqu'à l'obtention de nos droits».