«Les risques de dérapage, par rapport à la cible de déficit budgétaire de 5.9% annoncée pour 2013, sont avivés par les mouvements affectant la parité du dinar, d'une part, et par les variations des cours des produits de base sur les marchés internationaux, d'autre part», explique un expert. Le projet de loi de finances 2013 prévoit un déficit budgétaire de 5,9% du PIB. En effet, depuis les premiers mois de l'année en cours, les voix se sont élevées pour prévenir contre les risques inhérents au dérapage budgétaire estimé à 6,6% du PIB, tandis que d'autres ont appelé à élargir le déficit pour relancer l'économie. Les deux sons de cloches trouvent leurs fondements dans des modèles théoriques bien fondés et des expériences significatives. Toutefois, comme à l'accoutumée, c'est la conjoncture internationale et les besoins nationaux qui limitent l'éventail des choix, voire dictent aux décideurs les options à mettre en œuvre. Mieux encore, selon certains experts d'institutions financières internationales, il est plutôt judicieux d'interpréter le déficit budgétaire dans une logique de soutenabilité à moyen terme. Ainsi, on apprécie les montants du déficit, en tenant compte des politiques de maîtrise de ce dérapage, la destination des fonds, les sources de financement... D'où, entre les performances habituelles de la Tunisie qui gardait un niveau de déficit sous la limite de 3% du PIB et les dérives de certains pays qui souffrent d'une véritable crise économique, l'équipe en place doit projeter la position de nos budgets futurs. L'un des experts, M. Jameleddine Boumediène, a mis en relief, lors des journées de l'entreprise, une approche de gouvernance budgétaire. En effet, au regard de ce choc extérieur, le risque d'aggravation du déficit budgétaire tunisien est réel. «Les risques de dérapage, par rapport à la cible de déficit budgétaire de 5.9% annoncée pour 2013, sont avivés par les mouvements affectant la parité du dinar, d'une part, et par les variations des cours des produits de base sur les marchés internationaux, d'autre part», explique-t-il. A cet effet, il est à rappeler que la zone est entrée officiellement en récession au troisième trimestre 2012, pour la deuxième fois en trois ans. «Confrontée au choc de conjoncture récessive dans la zone euro, l'économie tunisienne devrait pâtir des moins-values d'exportations manufacturières, et donc de croissance», rappelle-t-il. Ce ralentissement favorise le dérapage budgétaire. Face à cette situation, il est opportun d'arrêter une politique claire, visant la restauration des équilibres budgétaires, notamment «une stratégie de “convergence des normes de gouvernance" en la matière», précise-t-il. L'expert avance une stratégie en deux temps. D'abord, une phase intérimaire favorisant le retour de croissance, admettant des normes jugées «intermédiaires» de stabilisation budgétaire. Ensuite, une deuxième phase de moyen et long terme de croissance auto-entretenue, favorisant le retour aux «normes budgétaires standards». «Ce qui correspondrait, entre autres, à un déficit du budget de l'Etat compris entre 2% et 3% du PIB», précise-t-il. L'expert se réfère au “tendanciel" qui a été réalisé jusqu'à 2010, et qui a été jugé «recevable» par les instances financières internationales. Cette rigueur exige nécessairement la consolidation du contrôle, notamment de «la consolidation de la position de la cour des comptes», illustre-t-il. Et d'argumenter : «Les missions de la Cour des comptes ont permis, dans bien des cas, de mettre en exergue des abus et “déviations" inhérents au manque d'organisation et de coordination, à la mauvaise gestion et aux incidences découlant de l'intervention de l'autorité de tutelle». Sur un autre plan, l'Etat doit assurer un climat propice aux affaires. Dans cette perspective, il incombe à l'Etat, selon l'expert, «d'assurer les conditions de sécurité et de stabilité qui incitent à la mise en œuvre d'activités productives, créatrices de richesses et d'emplois». Aussi, l'Etat veille à garantir le respect de la transparence et l'application des normes de redevabilité. De même, l'équipe dirigeante est appelée à mobiliser, de façon continue, les ressources humaines, matérielles et financières nécessaires, et promouvoir une utilisation efficiente de ces ressources. Mieux encore, il met l'accent sur «l'obligation de mener, périodiquement, des opérations d'évaluation du rendement des Administrations et de consultation pour mesurer le degré de satisfaction des opérateurs qui traitent avec l'Administration, notamment par la création d'unités de suivi et d'évaluation». A cet égard, il convient de rappeler que la croissance économique, à elle seule, ne peut pas résorber significativement le déséquilibre budgétaire. Elle est certes une condition nécessaire, mais non suffisante.