Après la lecture des constitutionnalistes, mardi 15 janvier, ce sont les syndicalistes qui passaient au crible, hier à Tunis, le brouillon de la constitution. Contradictions autour du caractère civil de l'Etat, lacunes sur les droits économiques et sociaux, réserves sur les libertés syndicales et le droit à la grève... Sont les principales critiques formulées lors d'une conférence nationale placée sous l'interrogation : «Quelle constitution voulons-nous ?» En octobre 2011, l'Ugtt, partie prenante dans la transition démocratique, publiait son projet de constitution, un texte en 124 articles. Depuis, la centrale syndicale ne perdra pas de vue le terrain constitutionnel, multipliant les rencontres régionales autour du projet. Et c'est avec une conférence nationale intitulée «Quelle constitution voulons-nous ?» qu'elle revenait hier à la charge, passant au crible le brouillon actuellement débattu en séance plénière à l'ANC. Article 27 : le droit syndical et le droit de grève sous haute réserve «Notre objectif est que tous les Tunisiens se reconnaissent dans la future Constitution, que celle-ci soit le fruit d'un consensus et qu'elle consacre la rupture avec le passé», déclare Mouldi Jendoubi, secrétaire général adjoint à l'ouverture des travaux de la conférence. Objectif non encore atteint de l'avis de Hamadi Abbassi, secrétaire général de la centrale syndicale, qui affirme que « dans sa forme actuelle, et en dépit de son évolution par rapport au premier brouillon, le texte actuel ne répond pas aux aspiration syndicales». Il cite principalement l'article 27 qui reconnaît le droit syndical et le droit de grève mais les soumet à une réserve indéfinie, ainsi énoncée : «En ce que ces droits n'exposent pas la vie des gens ou leur santé, ou leur sécurité au danger». Appelant à un droit syndical et un droit de grève sans réserves comme partout en démocratie, le secrétaire général de l'Ugtt met le doigt sur d'autres lacunes relatives aux droits économiques et sociaux, et sur une omission de taille qui consiste à la non-institutionnalisation du dialogue social et des négociations collectives. «Les rendez-vous du deuxième round» «Nous sommes sur la même longueur d'onde, en harmonie avec les attentes du syndicat et du peuple tunisien en ce que nous aspirons tous à une constitution tournée vers l'avenir, respectueuse des valeurs et des objectifs de la révolution et non l'otage d'une quelque idéologie partisane...», devait répliquer Mustapha Ben Jaâfar. Intervenant à l'ouverture des travaux de la conférence de l'Ugtt, le président de l'ANC a expliqué «l'accouchement difficile» de l'ANC par le choix des députés d'élaborer la future constitution à partir d'une page blanche. «Mais ce qui fait la spécificité de ce projet c'est qu'il est ouvert à la participation de toutes les composantes de la société, par la critique, les propositions, les manifestations...». Pour Mustapha Ben Jaâfar, l'implication de l'Ugtt et ses propositions seront prises en compte dans la prochaine étape — amélioration du brouillon de la constitution — qui va de pair avec «le deuxième round de l'initiative fédératrice de l'Ugtt». La conférence nationale de l'Ugtt devait se poursuivre à travers quatre lectures d'experts et suivant quatre axes : les principes de l'Etat par Chafik Sarsar, les droits économiques et sociaux par Mohamed El Gasmi, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif et leurs relations, par Ikbal Ben Moussa, le pouvoir local, par Mustapha Ben Letaief. - Article liées :Mustapha Ben Jaâfar, président de l'ANC à La Presse : « Il est grand temps d'associer les experts » Mustapha Ben Jaâfar, président de l'ANC à La Presse :