Un nouvel espace culturel qui naît est toujours à signaler d'une pierre blanche. Et nous ne cesserons jamais de le dire et de le redire : il n'y en aura jamais assez. Une sculpture de Raja Bouhamed Jamais assez de galeries, de théâtres, de librairies, de centres culturels, de cercles de lectures, de clubs de musiques. Le temps et le public se chargent par la suite de séparer le bon grain de l'ivraie, et les vrais engagements des opportunismes. Quant à nous, sachant les difficultés que rencontre tout projet culturel qui se monte, connaissant la mesure exacte de passion, de patience, et d'endurance que cela exige, nous ne pouvons que saluer et soutenir toute nouvelle initiative. Celle-ci est originale et mérite d'être signalée : dans la pinède de Raouad, au cœur des dunes, et à l'orée de ce qui sera la nouvelle zone touristique de Tunis, une nouvelle galerie d'art vient d'ouvrir ses portes. Le Cap, puisque c'est ainsi qu'elle se nomme, donne accès à un vaste complexe touristique qu'elle précède, offrant ainsi aux visiteurs la primauté des nourritures de l'esprit sur celles du corps. Samia Souissi, à qui l'on a confié la programmation de cette nouvelle galerie, a invité pour l'ouverture deux artistes de talent : le peintre Faouzi El Kemal, et l'artiste plasticienne sculpteuse Raja Bouhamed. Faouzi El Kemal est un peintre qui s'est fait rare en Tunisie où sa dernière exposition personnelle remonte à fort loin. Travaillant entre Berlin et New-York, il nous revient avec «Urbanitude», une exposition très architecturale d'œuvres structurées en cités imaginaires, cités de lumières et de couleurs, d'une harmonieuse rigueur, poétiques constructions d'un ailleurs de lui seul connu. Mais où affleurent les réminiscences de médinas de mémoires et de codes esthétiques familiers. «Je sais que Faouzi El Kemal s'est mis à la peinture par nécessité physique, par un besoin irrépressible de respiration, une manière singulière de lutter contre le manque d'air, l'étouffement», écrit de lui son ami Fadhel Jaziri qui ajoute : «Aujourd'hui, la transfiguration de paysages urbains, de sites antiques, et d'espaces contemporains provoque un contentement pour la maîtrise technique et un ravissement joyeux procuré par la précision de la facture, la générosité des formes, la profondeur de la vision, ainsi que la luminosité et la flamboyance des couleurs». Quant à Raja Bouhamed, elle a un joli palmarès. Et ces dernières années l'ont souvent vue consacrée. Lauréate à plusieurs reprises, et pour différents concours, elle n'en poursuit pas moins son parcours avec constance et persévérance. Elle a exposé en France, en Belgique, au Canada. Ses délicates sculptures, au lustre métallique, relèvent d'une étonnante intemporalité. Dans ses œuvres à la galerie Le Cap, elle évoque, par ses sculptures, «la mémoire des corps» «Une éternelle quête et requête de quiétude, de lumière, de volonté et d'existence.Une longue et dure traversée abstraite…Corps harmonieux ou désemparés, ils s'acharnent tous dans la quête de la liberté, de l'absolu» Mais parler de peinture, de sculpture est souvent un exercice vain, dont le seul but avoué est de vous donner envie d'aller voir par vous-même.