L'unité de recherche en droit international, juridictions internationales et droit constitutionnel comparé et la Konrad Adenauer Stiftung (KAS) organisent, les 4 et 5 avril à la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, un colloque international sur le thème «Les changements anticonstitutionnels de gouvernement : approches de droit international et de droit constitutionnel». Lors de ce premier jour de ce colloque de haut niveau et dans lequel l'actualité brûlante de la situation de la République Centrafricaine a été omniprésente, Hardy Ostry, représentant résident de la KAS, a déclaré que le thème traité vient à point nommé dans un contexte de transformations politiques rapides qui se sont produites, durant les deux dernières années, dans la région arabe, des transformations qui, selon lui, ont «embrasé les limites du droit international et du droit constitutionnel». Et pour cause, la communauté internationale, dans ses textes et ses déclarations, a rejeté en bloc depuis longtemps les changements anticonstitutionnels de gouvernement (entendons bien renversement d'un régime dans un Etat doté d'une constitution), c'est-à-dire que les instances internationales s'étaient transformées implicitement en garantes de l'application des constitutions locales. Seulement voilà, les récents bouleversements sociopolitiques, explique Hardy Ostry, ont montré les limites du rejet des changements anticonstitutionnels. «Certains chercheurs expliquent que le constitutionnalisme sur lequel l'Union africaine s'est basée dans la promotion de la démocratie ne fournit plus une réponse adéquate aux soulèvements populaires récents, qui avaient pour slogans la liberté, la dignité et la démocratie», précise-t-il. Rafaâ Ben Achour, directeur de l'Unité de recherche en droit international, juridictions internationales et droit constitutionnel comparé, et par ailleurs membre de la commission de l'Union africaine sur le droit international, estime, quant à lui, que «face aux changements anticonstitutionnels de gouvernement, il semble indispensable d'appréhender ces mutations en optant pour une approche basée, à la fois, sur le droit constitutionnel et le droit international». Le cas tunisien Membre du Parlement européen et ancien chef de la mission d'observation électorale de l'Union européenne en Tunisie, M. Michel Gahler émet quelques observations, lors de ce colloque, sur le processus de transition démocratique entamé en Tunisie. Pour lui, le processus vers une démocratie et l'Etat de droit n'est pas «linéaire», mais présente des ruptures et des retards auxquels les acteurs politiques doivent constamment s'adapter. «Tous les participants, gouvernement, Assemblée constituante et opposition politique devraient, surtout après les évènements des dernières semaines, assumer leurs responsabilités, afin d'accomplir les tâches pour lesquelles ils ont été élus dans les meilleurs délais et préparer la voie pour les prochaines élections», explique-t-il. Autre observation non moins importante, sous forme de recommandations, celle inhérente au fonctionnement et à l'indépendance des institutions étatiques centrales. Celles-ci doivent être tenues à l'écart de toute mainmise. «En période de transition démocratique, les acteurs doivent veiller à ce que les institutions de l'Etat ne soient pas des instruments pour l'exercice d'un monopole sur le pouvoir ou encore sujettes à l'influence d'un parti politique», fait-il observer. Enfin, Michel Gahler insiste sur le rôle de premier plan que doit jouer la société civile dans un contexte de transition démocratique. Pour ce faire, il est important qu'il y ait une volonté politique pour le renforcement de l'action citoyenne, car les associations de la société civile sont une véritable «école de la démocratie».