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Le goût des autres
L'entretien du lundi - Lotfi Hafi, profession libraire
Publié dans La Presse de Tunisie le 03 - 06 - 2013

Souvent, il reçoit des amis; parfois, il joue au théâtre ; toujours, il vend des bouquins. Lotfi Hafi, libraire et galeriste de profession, n'aime pas trop parler de son passé ni de ses études —pourtant si intéressantes— à l'Université. Il préfère vivre l'instant présent, décoder les mots, échanger des livres et des idées. Plus que l'esprit, c'est le rire qui le touche le plus. Rien ne semble perturber son corps de... balaise. Même pas le fait que les affaires ne marchent pas tellement et qu'en cette période trouble, les Tunisiens achètent de moins en moins des livres. Mais s'il y a une chose dans la vie qui peut influencer ses humeurs, c'est bien le goût des autres.
Cela fait exactement 23 ans que vous avez ouvert votre librairie, quel est votre bilan sur la lecture et les lecteurs en Tunisie?
Je pense que le secteur a subi une perte énorme, celle de la STD (Société tunisienne de diffusion) et de la MTE (Maison tunisienne d'édition). Beaucoup de nos références essentielles ont disparu avec la disparition de ces deux établissements publics. Heureusement qu'il existe des éditeurs privés qui proposent de belles choses à lire et qui réussissent, tant bien que mal, à combler ce vide.
Mais il faut avouer que les choses ont changé depuis la révolution. Tout de suite après le 14 janvier 2011, il y a eu un grand «boum». Les librairies ne désemplissaient pas. Les gens voulaient lire tout ce qui a été écrit sur la Tunisie. Les livres politiques, surtout, se vendaient comme des petits pains. Depuis le 23 octobre, la fameuse date des élections, cette flamme s'est éteinte.
Pourquoi donc, selon vous?
Il y a eu comme une sorte de désillusion. Un certain élan et un questionnement certain ont été interrompus. On dirait que les gens ne sont plus d'humeur à lire. Il y a de la tension dans l'air et l'atmosphère du pays est devenue trop pesante. Et puis, le fait que le ministère de la Culture ait été amputé d'un pourcentage très important de son budget au profit d'autres ministères, nouvellement créés, influe sur l'édition et la diffusion. Le seul sponsor littéraire du pays demeure la Comar. Cette compagnie d'assurances continue à donner des prix aux auteurs pour promouvoir l'édition.
Voulez-vous dire que la lecture est liée à l'ambiance générale d'un pays?
En quelque sorte, oui... bien que, dans l'absolu, je croie au contraire. Quelqu'un a dit qu'aucune dépression ne peut résister à une heure de lecture.
Mais si les gens ne lisent plus tellement, cela ne peut-il pas être lié au pouvoir d'achat, de plus en plus faible?
En effet, il y a un peu de ça, mais c'est surtout la dévaluation du dinar qui est une catastrophe pour tout le monde. Les derniers Umberto Ecco et Amin Maalouf se vendent à 40 dinars. C'est quand même énorme comme prix pour le Tunisien!
Et qui décide du prix d'un livre?
Ce sont l'importateur ou le diffuseur qui peuvent être, en même temps, les éditeurs. Ce sont eux qui décident. L'Etat devrait intervenir pour alléger un peu le prix du livre. On devrait imposer la loi du prix unique, comme en France, à l'époque de Jacques Lang.
On a bien réussi à faire disparaître la censure, mais le livre risque de disparaître à son tour, si les prix continuent de flamber.
A propos de censure. Nous croyons savoir qu'à un certain moment, vous étiez, en tant que libraire, préoccupé par des problèmes de sécurité. Est-ce vrai?
Nous avons été menacés par des Salafistes qui ont vu en vitrine la couverture d'un livre signé par un orientaliste hollandais, où figurait une femme aux seins à peine nus...
Comment avez-vous réagi?
Nous avons refusé l'intimidation.
C'est-à-dire?
Nous avons décidé que le livre ne quitterait pas la vitrine. Un jour, une cliente l'a acheté par soutien pour, ensuite, l'offrir à son mari.
Qu'en est-il du café littéraire?
Nous venons d'organiser une rencontre avec Mohamed Harmel, l'auteur de Sculpteur de masques qui a obtenu le Comar d'Or de la découverte. Ce genre d'activités s'inscrit dans un projet de promotion des jeunes talents littéraires. Nous avons, par ailleurs, aidé à la promotion d'Objets de Tunisie, un petit livre d'art magnifique de Sind Bahri.
Et où en est la galerie Mille Feuilles que vous avez inaugurée en 1993?
Elle continue à tourner, malgré les années de braise vécues pendant la période de Ben Ali. La commission d'achat censée aider les galeristes était constituée d'un groupe de mafieux. L'ex-ministre de la Culture, M. Ezzedine Bach Chaouch, l'a bien dit : «le dossier le plus sordide et où il y a le plus de corruption est celui des arts plastiques». L'argent était dispatché à droite et à gauche, selon les intérêts des uns et des autres. Ce dossier, qui est entre les mains de son successeur, risque de finir dans les oubliettes et l'impunité.
Ceci dit, nous n'avons pas d'autre choix que de résister. Les toutes dernières expositions de Dali Belkadhi, Oussama Troudi, Omar Bey et Mona Belhaj étaient des moments de pur bonheur.
Pour le mois de juin, nous avons une superprogrammation pour le Café littéraire. Nous recevrons Faouzia Charfi pour son livre La science voilée, le célèbre Nicolas Beau pour son livre Le vilain petit Qatar et nous organiserons une rencontre autour d'un livre sur les prisons et la torture en Tunisie, signé par un groupe d'écrivains tunisiens dont Héla Ammar et Samia Ghorbel.
A la galerie, nous clôturerons la saison avec un collectif de peintres qui exposeront leurs œuvres créées à partir d'une phrase de l'artiste européen Ben qui a dit : «Et surtout, n'oubliez pas de tomber amoureux!».


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