Par Yvonne BERCHER* Groupe antireligieux qui entend bousculer les conventions par l'imposition d'images perturbantes, choquantes, les Femen essaiment depuis l'Ukraine dans le monde entier. Totalitaires, puisqu'elles imposent la vision de leur corps dénudé à ceux/celles qui n'en veulent pas, elles traduisent la propension malheureuse d'une époque qui pose les rapports humains en termes d'antagonismes au lieu de préférer l'apposition, la rencontre sereine et apaisée de l'autre, à l'opposition. Acquise à la cause des femmes encore effectivement discriminées dans plusieurs domaines, en Europe comme ailleurs, je crains pour ma part que ces parades agressives ne soient simplement contreproductives. En effet, pourquoi s'acharner à perpétuer la tendance qui consiste à sempiternellement se focaliser sur l'apparence et le corps de la femme, femme-objet, femme excisée, femme fatale, etc. ? Ne serait-il pas possible de dépasser, une fois pour toutes, le stade de l'aspect pour s'intéresser à ce qu'il y a dans les têtes! En prohibant le port du voile sur son territoire, la France tombe d'ailleurs dans le même travers. La «méthode» Femen, caricature de démarche occidentale, illustre aussi que des termes comme honneur, liberté, dignité ont par définition un sens différent selon la culture dont on est issu. A l'époque du brassage mondial des sensibilités et des sociétés, n'est-il toutefois pas inéluctable que des confrontations et des ajustements aient lieu ? Puissent-ils toutefois s'opérer et se résoudre dans un dialogue peut-être intransigeant sur le fond, mais toujours courtois dans la forme, un échange qui respecte la sensibilité de chacun, seule manière de faire avancer les choses.