La justice implique une vingtaine de métiers juridiques et judiciaires et la grande famille du système judiciaire tente d'élargir le débat autour de l'indépendance et de la réforme du secteur Les acteurs de la sphère «justice» ont été unanimes sur le point de départ qui est, d'après eux, un diagnostic interne et global avant d'entamer la réforme du secteur avec comme priorité l'indépendance de la justice. Cependant et jusque là, les magistrats, les avocats et leurs conflits occupent encore une place de choix dans ce débat. Un débat qui a été ouvert hier par l'Observatoire tunisien de l'indépendance de la magistrature (Otim) dans un premier meeting de ces divers métiers sur le thème : «Les métiers judiciaires, un pilier de l'indépendance de la justice». Y étaient présents un important nombre de magistrats, avocats, conseillers fiscaux, huissiers de justice, huissiers notaires, greffiers, liquidateurs administrateurs judiciaires, administrateurs de faillite, interprètes, comptables, sécuritaires, notamment pénitentiaires, etc. Aussi, y étaient présents des représentants des structures professionnelles et syndicales de ces métiers à l'instar de l'association des magistrats tunisiens, la Chambre nationale des huissiers-notaires, l'Association des experts judiciaires, le Syndicat des conseillers du contentieux de l'Etat, le Syndicat de base des agents et cadres des établissements pénitentiaires. Le meeting se présente comme un premier rendez-vous entre les différentes professions qui relèvent de la justice et le débat a porté sur la question de l'indépendance de la justice ainsi que la délimitation des prérogatives de chaque profession en relation avec les autres. Le président de l'observatoire, Ahmed Rahmouni, a insisté sur l'importance de l'implication de tous les intervenants de la sphère justice en vue de lui donner la crédibilité nécessaire. Il a affirmé que ce meeting sera périodique et qu'il donnera sur la formation d'un premier noyau dont les objectifs restent internes à cette sphère notamment la création d'un cadre d'interactivité entre les différents métiers en vue de plus de synchronisation et d'entente. «Nous devons partir de la collecte des informations relatives aux différents métiers juridiques et judiciaires, qui restent partiellement inconnus de tout le monde. On vise l'instauration de bases de travail communes et en premier lieu celles déontologiques et ce dans le cadre de l'instance d'aide judiciaire relevant de l'observatoire», a-t-il indiqué. Pour sa part, Omar Oueslati, magistrat membre de l'Otim, chargé de l'instance de l'aide judiciaire, est revenu sur les causes de l'éparpillement des métiers judiciaires et juridiques. D'après lui, la relation entre ces derniers est plutôt complémentaire. «Nous voulons réactiver l'instance de l'aide judiciaire au sein de l'observatoire en tant qu'instance consultative. Ça sera une sorte de clinique juridique qui fournira toutes les données dont le citoyen aura besoin aux différents niveaux de la justice. Nous avons une stratégie qui vise la création d'un code d'éthique commun des professions juridiques et judiciaires. De même, on établira un manuel procédural, ce qui propulsera l'interactivité et l'entraide entre ces métiers et tout ça rentre dans la garantie du droit du citoyen à une équité devant la justice que nous tous voulons indépendante», a-t-il ajouté. Une vision commune s'impose Oueslati a évoqué la nécessité d'engager un diagnostic de chacun des métier à part, avec notamment des meetings régionaux, pour prendre en considération toutes les spécificités professionnelles et régionales. Les interventions ont porté sur l'état actuel de l'indépendance de la justice, les dénominateurs communs entre les différents métiers juridiques et judiciaires et les péripéties de l'interférence entre eux, ainsi que sur les problèmes auxquels fait face chaque métier. Alors que certains ont essayé de faire connaître les difficultés qui les entravent, d'autres ont relevé des dossiers qu'ils ont jugés urgents à l'instar de la corruption fiscale. Le défaut d'organisation de certains métiers et d'un cadre juridique clair ainsi que l'absence de recyclage ont été abordés par d'autres. Les lois, leur contradiction et la manipulation dont ils font l'objet sont une autre paire de manches sur laquelle ont insisté notamment les experts fiscaux et judiciaires. De même, on a cité les conventions internationales comme un point de repère à ne pas dépasser pour savoir où se situer dans le processus de réforme et des procédures et des lois organisatrices de la justice. Hedi Chehm, juriste et membre du comité technique de la Justice transitionnelle, a quant à lui souligné l'importance des structures qui organisent ces métiers et les procédures à suivre par chacun des intervenants. «Le travail commence à partir des lois, qui doivent être révisées, et leur application. Il existe un certain tiraillement entre les différents métiers judiciaires en ce qui concerne leurs prérogatives et domaine d'activité», a-t-il indiqué. Pour sa part, Skander Sallemi, conseiller fiscal, a évoqué les intrus dans le secteur du conseil fiscal, outre la limitation du domaine d'action qu'a engendré la loi de 2011. L'unification des efforts et de la vision a été le point commun sur lequel ont été unanimes les différents intervenants dans ce meeting, qui se poursuit aujourd'hui.