De rendez-vous manqué en rendez-vous manqué, l'échange va-t-il dépasser ses mauvais génies? Récit d'une rencontre impossible... Depuis presqu'une année, les tentatives de dialogue entre les différentes formations politiques se sont succédé en Tunisie. Leur rythme est même allé crescendo ces derniers mois, suivant la montée de la crise économique et politique, la dégradation de la situation sécuritaire et l'effritement de la légitimité électorale au gré des prolongations qui se jouent à l'Assemblée constituante. De blocage en blocage et d'échec en échec, le compromis se révèle difficile dans un contexte de bipolarisation extrême du pays. «Je t'écoute...moi non plus», semblent se dire les protagonistes, dont les échanges, loin d'être sereins, explosant de temps à autre sur les plateaux télévisés, donnent le tempo des tensions confinées dans la moiteur des salles de réunion... « On dirait que les mots n'ont pas le même référentiel pour les uns et pour les autres », déclarait le politologue Larbi Chouikha dans une interview accordée à La Presse en janvier dernier. Rappel des dates clés et des enjeux d'un consensus avorté. Octobre 2012 : L'Ugtt initie une conférence nationale de dialogue. Le mouvement Ennahdha et le CPR boycottent ce premier round de dialogue sur des questions aussi cruciales que la violence politique, l'Etat civil, le régime républicain, les droits de l'Homme... 5 avril 2013 : Sept partis participent au dialogue national organisé à Dar Dhiafa à Carthage à l'initiative des présidents de la République et du Gouvernement. On tente de trouver un accord sur la date des élections. L'Ugtt n'est pas invitée à Carthage. Nida Tounès suspend sa participation aux discussions. 16 mai 2013 : L'Ugtt engage son deuxième round de dialogue national. Objectif : accélérer les travaux de l'ANC, raccourcir la période transitoire et trouver des compromis sur les articles controversés de la Constitution : l'Etat civil, les libertés, la question du sacré...Ennahdha et le CPR prennent part aux discussions. 21 juillet 2013 : L'Ugtt, en partenariat avec l'Utica, l'Ordre national des avocats et la Ltdh, démarre le troisième round du dialogue national. A l'ordre du jour : l'établissement d'un calendrier clair des prochaines échéances électorales. 25 juillet 2013 : Les organisateurs du dialogue suspendent les discussions suite à l'assassinat politique du député Mohamed Brahmi. Une soixantaine de députés de l'opposition se retirent de l'ANC et se mobilisent dans l'animation du sit-in du départ. 29 juillet 2013 : Le comité administratif de l'Ugtt tient réunion et décide de présenter une initiative de sortie de crise, qui préconise entre autres la dissolution du gouvernement Ali Laârayedh. Ainsi que la formation d'une commission d'experts en droit constitutionnel pour la révision de la dernière version de la Constitution et l'élaboration d'un projet de code électoral. 22 août 2013 : Rached Ghannouchi annonce accepter le dialogue sur la base de l'initiative de l'Ugtt. Une proposition qui prévoit la mise en place d'un cabinet apolitique de compétences nationales et la fin au plus vite des travaux de la Constitution. Le soir même, un communiqué du mouvement Ennahdha fait marche arrière par rapport à la déclaration de Ghannouchi. 3 septembre 2012 : Troïka et opposition campent toujours sur leurs positions. Aucun consensus en vue. Houcine Abassi, le SG de la centrale syndicale, menace : « Si des solutions ne sont pas trouvées dans les jours qui viennent, je divulguerais quatre vérités douloureuses sur ce dialogue. Des vérités que le peuple tunisien doit connaître ».