L'un des plus grands couturiers tunisiens expose dans un lieu mythique à Paris Un temps fermé pour rénovation, le Palais Galliera, Musée de la mode, à Paris, ouvre ses galeries rénovées. On avait choisi pour date la semaine qui réunit dans la capitale française les journalistes du monde entier : la Fashion Week. Et pour célébrer l'événement, un hommage au seul couturier qui, depuis vingt-cinq ans, boude justement le diktat de cette Fashion Week : Azzedine Alaïa. Alaïa le magnifique défile « à la maison », dans son atelier-maison-studio-boutique de la rue de la Verrerie, installé dans les anciens dépôts du BHV, et y présente ses créations, au rythme de son inspiration. Alaïa le Tunisien à la success story si belle qu'on adore l'entendre racontée par lui, avec gouaille et malice, drôlerie et impertinence. Alaïa qui, une fois de plus, fait courir le monde entier de la mode, et dont les pièces d'exception sont exposées en une magnifique rétrospective, au Palais Galliera, mais aussi au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris jusqu'à la fin du mois de janvier. D'autres musées, et les plus prestigieux, lui avaient rendu hommage : le Palazzo Corsini, à Florence, où on le présente en même temps qu'une exposition de Julian Schnabel. Le Groninger Museum, où ses créations sont présentées aux côtés des œuvres de Picasso, Basquiat,Kiefer.... Plus tard, au Guggenheim Soho, il est exposé avec les toiles d'Andy Warhol. A Paris, pour la première fois, et dans deux musées simultanément, cet amoureux de l'art poursuivra ces rencontres qui le passionnent. C'est à l'Ecole des Beaux-Arts de Tunis, en section sculpture, que le jeune Alaïa fit ses armes. Et apprit à travailler « à même le corps des femmes », comme il le répète toujours. Son épopée dans l'univers de la mode, de chez Dior, d'où il fut renvoyé au bout de cinq jours, à la maison Givenchy, de sa chambre de bonne en échange de laquelle il cousait des blouses pour la concierge, à la rue de la Verrerie, ses grandes histoires d'amitié avec Leïla Menchari, Louise de Vilmorin, Arletty, tout cela a forgé une légende dont cette rétrospective est la consécration. De lui, on dit qu'il y a la femme d'avant, et celle d'après Alaïa. Inventant de nouvelles morphologies par son exceptionnelle maîtrise de toutes les étapes de la confection d'un vêtement, il sculpte les corps par un jeu complexe de coutures, un traitement inédit des étoffes, une virtuosité des découpes. Couturier d'une œuvre qui traverse le temps, il privilégie les vêtements qui durent, et cette rétrospective montre, justement, l'extraordinaire actualité de ses créations. Au Palais Galliera, les robes d'exception d'Alaïa sont exposées selon une scénographie imaginée par le designer Martin Szekely : le palais est baigné de pénombre, et les robes, sur des estrades symétriques tendues de noir, semblent de véritables sculptures offertes au regard. Au Musée d'Art Moderne, dans la salle Matisse, où se poursuit l'exposition, les estrades sont tendues de blanc, et aux robes rares présentées, robes d'un soir inspirées par une égérie, on offre pour décor «La danse des nymphes » et « La danse inachevée». Il y a quelques années, à la suite d'une grande exposition dans un musée étranger, on avait rêvé d'exposer Azzedine Alaïa au musée du Bardo, dans la grande salle des mosaïques. Le ministère de la Culture avait donné son agrément, mais pour de multiples raisons, le projet n'avait pas abouti. Un jour peut-être....