Ruud Krol n'a fait que nous réconcilier avec le football, le vrai ! Les Tunisiens ne s'y sont pas trompés. Pour ceux qui étaient scochés à leur écran, pour tous ceux qui avaient fait le déplacement pour Radès, y compris de l'intérieur de la république, cela fait longtemps que nous n'avions pas vu ça. Il aurait fallu qu'on passe le nom de Krol et que le Hollandais révèle sa liste pour que tous comprennent que quelque chose a changé et que rien ne sera plus comme avant. Enfin, tant que Krol sera là... Pour la petite histoire, ou plutôt pour la grande, le football mondial a connu des cycles meublés par des clubs-symboles. Le Real Madrid de la fin des années 50-début des années 60 de Di Stefano, Puskas... Puis l'Ajax Amsterdam des années 70 de Crujff, Keizer, Neeskens, Krol... Dans les années 80, c'était le règne de Liverpool de Kenny Dalglish, Keegan, Heighway, Rush... Culture footballistique Les années 90, c'était au tour du Milan de Sacchi avec Gullit, Van Basten, Rijkaard, Massaro et Baresi pour en arriver, enfin, au Barça de Messi, Iniesta et Xavi. A chacun son époque et à chacun son point de vue. Le Real de Di Stefano a été magique, tout comme le Barça mais la vague hollandaise qui a tout emporté sur son passage a, de l'avis de tous, révolutionné le football. Et pas seulement l'Ajax puisque le Feyenoord de Van Hanegem et le PSV Eindhoven de Kindvall et Jansen ont également posé le football batave sur le toit du monde. Du moins à l'échelle des clubs. Ajax Amsterdam, le football total, Krol, Suurbier, Hushoff, Blakenburg, les frères Muhren, Haan, Neeskens, Crujff, Keizer, qui se permettait pratiquement d'évoluer sans gardien, avec un Stuy dont personne ne s'en rappellera. La plus grande équipe de tous les temps, avec une possession de la balle égale ou supérieure au Barça... En débarquant à Sfax puis en équipe nationale, Ruud Krol a apporté avec lui sa culture de jeu inculquée par Michels puis par Stefan Kovacs. Des principes simples et compliqués à la fois : possession du ballon, récupération, couverture, soutien, replacement; les fondamentaux que nos entraîneurs et sélectionneurs oublient un peu trop facilement pour s'égarer et égarer leurs joueurs dans la seule récupération et dans la couverture à deux, trois, voire quatre demis défensifs. Football dépassé et football triste dont entraîneurs et sélectionneurs de chez nous devraient avoir honte pour nous avoir menés à l'échec, pour avoir fait fuir le public. Ceci sans parler des petites combines, des petits calculs et des petites gens qui sont à la tête de notre football, à la tête de la direction technique de nos équipes nationales, à la tête de la liste des conseillers d'un président de la fédé et des autres membres qui n'ont rien à voir avec le football. Retour aux fondamentaux Il n'a rien fait d'extraordinaire, Ruud Krol, sauf appeler et faire jouer ceux qui le méritent vraiment, même si tout n'a pas été parfait avec un fabuleux Chikhaoui qui a dû être remplacé un peu plus tôt, même si on aurait aimé voir un peu plus Khazri et Ben Htira et même si la bêtise de notre fédération nous a privés du joueur qui pouvait faire basculer la rencontre en faveur de la Tunisie : Hamdi Harbaoui. Fondamentaux, disions-nous. Nous sommes, ou plutôt nous étions, l'unique sélection avec trois demis défensifs, sans véritable animateur de jeu offensif et parfois même sans avant-centre. Et plus les joueurs gaffaient sur le terrain et en dehors, plus ils devenaient incontournables. Certains, d'ailleurs, avaient la nostalgie d'un passé récent, à l'instar de Issam Jomaâ, pas content d'être relégué au banc des remplaçants et qui n'a pas manqué de l'exprimer, lui la «star suprême». Lamentable! Avec Krol, nous sommes au moins sûrs que cela ne se reproduira plus et que Jomaâ fera long feu en équipe nationale. Lui et ses semblables qui faisaient la loi. Chikhaoui, Ben Htira, Khazri, Sassi, Ben Yahia et même Harrane et Hannachi : autant de joueurs qui savent également construire. Voilà la grande nouveauté en équipe nationale, voilà l'apport et le plus immédiat apportés par un homme nourri au football, le vrai où ça se joue au mérite et non au copinage, aux compromis et à la compromission. Pas de polémique sinon la bonne aptitude, celle où on parle de choix des hommes et de la tactique en toute sérénité, en parfaits professionnels. Tout un pays réconcilié avec son équipe nationale après l'avoir vomie. Et toujours pas de mea culpa de la part de tous ceux qui ont activement participé à la déchéance de notre onze national et que nous n'aimerions plus jamais voir dans notre paysage footballistique. Même Sami Trabelsi nous a déçus et continue à nous décevoir avec cette ultime déclaration où il ne «comprenait pas la mise à l'écart de Msakni». Sami a-t-il oublié que ses patrons lui ont intimé l'ordre de renvoyer Youssef du stage de l'équipe nationale et qu'il a été le voir dans sa chambre pour le lui signifier tard dans la nuit avant que ses coéquipiers ne s'y opposent ?! Autant de choses que nous aimerions oublier à l'instant pour nous concentrer sur le match retour face au Cameroun. Les comptes, nous les ferons après et chacun doit assumer ses responsabilités et payer pour ses erreurs, à commencer par les décideurs. En attendant que du bonheur avec Krol, Chikhaoui et les autres !