Sans aucune protection policière rapprochée, Montassar Sassi et sa famille vivent aujourd'hui la peur au ventre Décidément, on n'en finit pas avec les menaces de mort contre les journalistes tunisiens. Et si certains d'entre eux ont la possibilité de bénéficier d'une protection policière rapprochée, d'autres n'ont pas une telle chance. C'est le cas de la majorité des journalistes free-lance et des correspondants régionaux. Montassar Sassi, correspondant d'une radio nationale au Cap Bon — Shems FM — et secrétaire général adjoint de la Ligue des correspondants journalistes, en fait partie. Selon les propos de l'intéressé, c'est un agent de police qui l'a mis en garde à propos de menaces pesant sur lui, après que l'imam de la mosquée de Barraket Essahel a émis, lors de son prêche de vendredi dernier, une fatwa implicite contre lui, en le qualifiant d'«élément perturbateur, semant le chaos et la confusion à travers les informations qu'il rapporte». «Cet imam a appelé haut et fort les fidèles à s'en prendre à moi», déclare Montassar. Dans le collimateur d'Ansar Echaria Toujours selon le correspondant régional, ces dernières menaces viennent s'ajouter à celles proférées, le 2 octobre dernier, par un individu affilié au mouvement salafiste. «Suite à une correspondance diffusée sur les ondes de la radio, basée sur des informations officielles et citant un individu appartenant au mouvement Ansar Echaria qui aurait été arrêté par la police en possession de vidéos filmées au mont Chaâmbi, le 2 octobre 2013, j'ai été interpellé par un certain Zied Ben Saâd, qui a menacé de me couper la langue et les jambes», affirme le secrétaire général adjoint de la Ligue des correspondants journalistes. Prenant la menace au sérieux, le lendemain, M. Sassi avait porté plainte. Sauf que l'individu, selon la police locale, avait déserté les lieux et se serait déplacé vers Sfax. Mais avant d'aller informer la police et le procureur général du gouvernorat de Nabeul, Montassar avait voulu prendre le pouls auprès de l'un des représentants d'Ansar Echaria dans la région. «Vu mon travail de journaliste, je savais qu'un certain Issam Koubakgi était le bras-droit d'Abou Yadh à Barraket Essahel. Ainsi, j'ai fini par prendre contact avec lui pour comprendre un peu la situation», précise Montassar. Il ajoute : «Ce Issam Koubakgi m'a confirmé que des salafistes avaient planifié d'attaquer mon domicile pour m'égorger. Et je peux étayer mes propos par un témoin», ajoute le journaliste, qui a déposé une nouvelle plainte, lundi, contre l'Imam et le dénommé Issam Koubakgi. Aujourd'hui, Montassar Sassi vit la peur au ventre. «J'ai peur pour ma famille et surtout pour ma fille de 7 ans, qui a été menacée par Ziad Ben Saâd. D'ailleurs, je ne peux même plus aller prier à la mosquée du quartier. Tout le monde m'évite. Nous, les correspondants régionaux, nous sommes très désavantagés par rapport aux journalistes basés à Tunis. Nous sommes marginalisés. Et nous n'avons pas la visibilité nécessaire pour bénéficier d'une protection rapprochée. Je remercie tous ceux qui m'ont soutenu et surtout le président du Centre de Tunis pour la liberté de la presse (Ctlp), Fahem Boukaddous», conclut-il. Il reste à rappeler que ce n'est pas la première fois que l'intéressé est victime d'une agression perpétrée contre les journalistes. Le 9 avril 2012, Montassar Sassi a été «séquestré, manu militari, dans les locaux du bureau régional du Parti du travail tunisien à Hammamet», où il a été, selon lui, molesté et agressé par un membre du bureau régional de ce parti, alors qu'il couvrait les événements de la commémoration de la fête des Martyrs.