Par Khaled TEBOURBI Le milieu des arts réagit bien à l'arrivée de Mourad Sakli au ministère de la Culture. Les gens de la musique surtout, cela s'entend. Aucun risque d'erreur. C'est la première fois depuis l'Indépendance (depuis toujours?!) qu'un musicien de profession, compositeur, concertiste, musicologue de surcroît, se voit confier ce poste généralement réservé aux politiciens de carrière, au mieux, à des intellectuels «convertis» à la politique. Mourad Sakli, on le sait, n'appartient ni à cette catégorie, ni à cette autre. Ni n'y a jamais appartenu. C'est ce qui, en premier, lui vaut le préjugé favorable. Les artistes n'oublient pas que les anciens ministres de la Culture finissaient toujours par sacrifier «leurs belles promesses» à l'autel des «instructions». Lui, Mourad Sakli, a déjà prouvé qu'il n'inclinait point à ce genre de concessions. On se souvient de «Carthage 2009 et de sa démission intempestive», après que son programme eut été «revu et corrigé» par le palais. Y a-t-il, maintenant, un avantage supplémentaire dans le fait qu'il soit musicien? Beaucoup le disent (le prédisent) : là, avec le délai court, avec la seule possibilité du court terme, l'action festivalière va certainement primer. La matière musicale est dominante dans les festivals. Avec un musicien, on fera sûrement les meilleurs choix. Exemple de la session de «Carthage 2013». D'aucuns s'interrogent, néanmoins, sur ce que «le ministre musicien» sait des autres secteurs et sur ce qu'il est en mesure de «faire pour eux». On a parlé avec des plasticiens, avec des professionnels de l'édition, ils paraissent dubitatifs. A dire vrai, la question est posée trop vite. En tout état de cause, dans un gouvernement de transition, dans ce gouvernement précis auquel nos honorables élus n'accorderont sûrement pas la moindre prolongation, le problème de «la polyvalence artistique» du ministre de la Culture ne risque pas «d'inquiéter» grand monde, de sitôt. Et encore : on peut lire sur le site du nouveau ministre que, même «limité par le temps», «il compte bien s'attaquer» à tous les dossiers de la culture et, à défaut, de pouvoir les mener à terme, de mettre «leurs chantiers en route». Parmi ces dossiers, la propriété intellectuelle et «sa réelle mise en application». Cela intéresse tous les créateurs, pas seulement, comme on a tendance à le crier à tout-venant, les musiciens et, spécialement, le marché musical. On lit aussi que l'on ouvrira le dossier du «statut et conditions de l'artiste». C'est une nouveauté, une «rareté», du moins. Les artistes la soulèvent depuis des lustres. Jamais ou presque l'establishment. Mourad Sakli parle également de la mise en place d'une législation relative au mécénat, de «patrimoine immatériel et de savoir traditionnel», de «tourisme culturel» et de «droit à la culture». Vaste «agenda». L'idée (reçue) que les gens de la musique ne sont pas «polyvalents» est encore une fois démentie. La musique peut parfaitement donner des hauts cadres à la culture. C'est une réalité depuis la fin 80, depuis la sortie des deux premières promotions de l'Institut supérieur de musique, et la belle génération de musicologues érudits qui en a résulté. Tout «le mal» que l'on souhaite à Mourad Sakli, c'est qu'il s'emploie «dur comme fer», pendant ce délai court, à en administrer, enfin, la preuve. Un «coup de maître» en guise de «coup d'essai». Pourquoi pas?