Mourad Sakli, le musicologue et musicien, ancien directeur du Centre des musiques arabes et méditerranéennes et initiateur de plusieurs rencontres musicales dont notamment «Musiqat», vient d'être nommé directeur du 49ème Festival international de Carthage. Il peut se revendiquer d'un passé de militant ou d'opposant au régime de Ben Ali. Mourad Sakli a, en effet, réussi tout au long de sa carrière à préserver son intégrité intellectuel et à défendre, sans faire aucune concession, la qualité artistique. C'est aussi celui qui a dit «non» au pouvoir en place, en 2010, et à s'élever contre toute forme d'ingérence pour finir par démissionner de son poste de directeur du festival de Carthage, à la veille du démarrage effectif de la session. Que nous réserve-t-il alors pour ce retour aux commandes de cette même manifestation ? « De la qualité et rien que de la qualité, de la joie et du féerique. Ce que je voudrai proposer au public tunisien, c'est de retrouver la Tunisie et sa joie de vivre, à travers une programmation qui lui procure du rêve et du plaisir », nous confie Mourad Sakli. D'ailleurs, le festival de Carthage, qui débutera vers le 12 juillet et se clôturera vers le 17 août, coïncidera, cette année, avec le mois de Ramadan ; et d'après le directeur du festival, le mois saint stimule une certaine ambiance propice à l'évasion. «Les gens aiment bien sortir et veiller. Ils sont souvent à la recherche d'une certaine qualité et nous ferons le nécessaire pour les satisfaire», ajoute-t-il. Mais le dilemme persiste : comment satisfaire tous les goûts entre un public qui cherche une certaine qualité et celui qui est demandeur de soirées plus festives ? A cette question, Mourad Sakli semble convaincu que «quand on dit qualité et spectacles de haute facture, cela inclut pour tous les genres et toutes les formes. Le seul critère de sélection est l'esthétique et la rigueur, aussi bien dans la musique classique que dans la variété... Le festival de Carthage n'est pas un festival élitiste, mais son aspect populaire ne veut pas dire forcément badiner avec la qualité», comme il l'explique. Et d'ajouter : «D'ailleurs, il y aura du changement dans la manière même de concevoir la programmation, et à chaque semaine il y aura un spectacle féerique, une variété arabe, un artiste international et un spectacle tunisien, il y aura aussi du théâtre, de la danse et du cinéma... ». La grande question est, forcément, la participation des artistes-chanteurs tunisiens qui, à chaque session, revendiquent leur droit à la scène de Carthage, et qui n'arrivent pas à remplir les gradins. A ce propos, Mourad Sakli affirme qu'il y aura un quota théorique de 20% pour les Tunisiens, un quota qui peut être revu à la hausse, selon la qualité des projets proposés. «Je ne programme pas des noms, mais des projets avec des critères bien déterminés et il faudrait que 60% du programme de l'artiste soit inédit et nouveau. Je garde tout de même une ouverture pour les découvertes pour offrir leur chance à des artistes tunisiens performants qui ont besoin d'encouragements». Pour ces spectacles, toujours accusés de laisser indifférents le public tunisien, le directeur du festival de Carthage s'engage à assurer la promotion et la publicité qu'il faut pour attirer le public. Discret sur les détails de sa programmation, Mourad Sakli ne veut nous révéler aucun nom avant la signature des contrats, mais il nous glisse quelques indices, disant : «Je rêve de ramener des artistes de grande facture qui ne se sont jamais produits à Carthage. Il y en a, au moins, une centaine de par le monde et c'est de ce côté-là queje compte m'orienter», conclut-il.