La reprise du chemin de Damas s'opère dans la circonspection et la réserve. Ce faisant, les Tunisiens ne voudraient surtout pas offusquer outre mesure nos partenaires du Golfe dont les principaux Etats sont résolument engagés dans le financement et le soutien logistique de la lutte armée contre le régime de Bachar Al-Assad Les relations tuniso-syriennes sont-elles en passe d'être rétablies ? Ce serait trop hasardeux d'y souscrire ici et maintenant, même s'il y a du nouveau en la matière. Aux dires du ministère des Affaires étrangères, les relations dites administratives pourraient reprendre incessamment. C'est-à-dire des prestations de services consulaires destinées aux ressortissants tunisiens établis en Syrie. Et ce n'est pas une mince affaire. Ils étaient quelque deux mille Tunisiens, établis en Syrie à divers titres, à la veille de la rupture unilatérale des relations diplomatiques avec Damas sur un coup de tête présidentiel. La nouvelle s'abattit sur eux comme un désastre. Et pour cause. Ils s'en retrouvèrent carrément coupés de leur racine et en mal de régularisation de papiers d'identité et de foule de prestations et d'assistance diligentées par un consulat. Cela greva leur statut précaire dans un pays livré, depuis des années, à la guerre civile, aux bombardements soutenus et à l'anarchie. Désespérés et n'en pouvant plus guère, ils piquèrent tête en avant dans la plus grande détresse. Certains d'entre eux, des familles entières, en furent réduits à errer en SDF au petit bonheur la chance, de mosquées en couvents, d'abris de fortune en dessous de ponts. D'autres furent obligés de mendier. Ils ont perdu leurs commerces, leurs demeures, leurs enfants cessèrent tout bonnement de fréquenter les écoles et lycées. Des Tunisiens sont nés entre-temps en Syrie sans qu'ils aient pu bénéficier de papiers d'identité. D'autres se sont mariés sans pouvoir régulariser leur union aux yeux de la législation tunisienne. L'éventail des cas désespérés est effarant. Partout l'impasse, la détresse, l'impuissante solitude. C'est dire si le rétablissement des prestations administratives pourra constituer une véritable aubaine, voire un sauvetage, pour les deux mille Tunisiens de Syrie. Cela permettra également de reprendre langue, même timidement, avec Damas. Ce qui pourra s'avérer fort utile dans le traitement de l'épineux dossier des milliers de jihadistes tunisiens embrigadés dans les rangs des mouvances terroristes combattant en Syrie. Un dossier qu'il faudra bien attaquer sérieusement et bien ficeler à brève échéance. Pas plus tard que le week-end dernier, un jeune étudiant, ancien jihadiste tunisien en Syrie, s'est fait exploser à Sfax. Il manipulait des bombes artisanales qu'il préparait avec ses compères en vue d'attaques terroristes à large échelle dans la capitale du sud. En même temps, la diplomatie tunisienne, remise en branle depuis l'avènement du gouvernement de Mehdi Jomâa, y retrouvera son lustre. Le chef du gouvernement et le ministre des Affaires étrangères ont déjà pris leur bâton de pèlerin pour se rendre dans les pays du Maghreb, au Golfe et aux Etats-Unis d'Amérique. En attendant de se rendre en Europe occidentale. Pour l'heure, c'est une diplomatie de déclarations d'intention et de rapiéçage. En attendant la relace de la coopération multiforme, essentiellement économique et financière. Cependant, la reprise du chemin de Damas s'opère, croit-on savoir, dans la circonspection et la réserve. Ce faisant, les Tunisiens ne voudraient surtout pas offusquer outre mesure nos partenaires du Golfe. Les principaux Etats du Golfe sont en effet résolument engagés dans le financement et le soutien logistique de la lutte armée contre le régime de Bachar Al-Assad. Et nous entamons précisément une nouvelle phase de relations avec ces pays précisément. En somme, là aussi, Mehdi Jomâa et le ministre des Affaires étrangères, Mongi Hamdi, marchent sur le fil du rasoir. Il y a des urgences, des limites et des contingences. Et comme l'instruit si bien le proverbe populaire, d'un côté ça brûle, de l'autre c'est incandescent. Ce qui résume la donne tunisienne bien au-delà de la seule diplomatie.