Le travail photographique, les décors et costumes sont saisissants... comme la peinture de Renoir ! Le cycle de projections-débats «Vivre ensemble» 2014 de la Médiathèque Charles-de-Gaulle a présenté, vendredi dernier, pour sa onzième séance, le film Renoir de Gilles Bourdos. Habitués et autres fidèles étaient au rendez-vous pour découvrir cette œuvre (sortie en France en 2013) qui a été présentée en clôture de la section «Un certain regard» au Festival de Cannes 2012 et sélectionnée pour représenter la France aux Oscars du cinéma 2014, dans la catégorie meilleur film en langue étrangère. Loin des années impressionnistes associées le plus souvent au nom du grand peintre Auguste Renoir (qui pourtant s'est réconcilié, des années durant, avec les maîtres préférés de ses débuts, tels que Raphaël et François Boucher, et a opéré, tout en rompant avec les conventions, un retour vers le classicisme), le réalisateur et scénariste niçois s'est intéressé aux dernières années du grand peintre. On est en 1915. Renoir est au crépuscule de sa vie. Il vit dans son domaine des Collettes à Cagnes-sur-Mer, sur la Côte d'Azur. A l'image, outre le cadre édénique, on est tout de suite séduit par la présence et la performance de Michel Bouquet qu'on reconnaît derrière la barbe blanche du peintre. Des rhumatismes déformants et autres problèmes de santé avaient obligé ce dernier à se déplacer en chaise roulante. Il avait perdu son épouse Aline Charigot, avec qui il avait eu trois garçons, Pierre, Jean le cinéaste, et le dernier, Claude, qu'on appelle «Coco». Il était éprouvé par cette perte, par les douleurs du grand âge, et les mauvaises nouvelles venues du front : ses deux aînés, mobilisés, étaient blessés... C'est alors qu'une jeune fille, Andrée, entre dans sa vie et devient à la fois son modèle et sa source d'inspiration. Jeune, belle, fraîche et ambitieuse, elle est le centre d'intérêt de tout le domaine, suscitant la jalousie des domestiques et provoquant l'intérêt du jeune «Coco», qui semble être oublié par tout le monde et errer dans l'immensité du domaine. Andrée, qui sera le dernier modèle du «patron», lui insufflant beaucoup d'énergie, entre dans une relation plus ou moins secrète avec Jean, le fils blessé revenu de la guerre. Elle est présentée comme le déclencheur de sa carrière de cinéaste. Hésitant, fragile, sans grandes ambitions et évoluant sous l'ombre du génie paternel, au contact d'Andrée, le jeune officier verra ses idéaux et son quotidien bouleversés. Des bouleversements qui, malheureusement, sont atténués par l'aspect didactique du film. Le réalisateur semble s'être perdu entre sa volonté de figurer Renoir s'entêtant, malgré l'âge et la maladie, à peindre et à perfectionner son art et, d'un autre côté, celle de raconter l'influence d'Andrée sur son monde et l'évolution de ses proches. Le film garde un aspect biographique un peu fade et G. Bourdos ne va pas jusqu'au bout du propos. Il semble s'éparpiller des fois, ce qui donne un aspect peu clair au fil dramatique et fait que l'on ne retrouve pas cette passion recherchée... Du coup, c'est l'image qui finit par l'emporter, écrasant le récit. Mais quelle image ! Le travail photographique, les décors et les costumes sont saisissants, à l'instar de la peinture de Renoir, avec des plans fluides, floutés des fois, vaporeux et vibrants de lumière.