De notre envoyée spéciale Samira DAMI La 25e édition des JCC du 1er au 8 novembre Beaucoup se demandent à quoi servirait la présence tunisienne sur la Croisette si de surcroît aucun de nos films n'est sélectionné dans les différentes sections du festival,ni en sélection officielle, ni en compétition, ni dans les sections parallèles : la Quinzaine des réalisateurs et la Semaine de la critique ? La réponse est simple : le cinéma est certes un art mais aussi une industrie qui suppose une infrastructure de production, entre studios et décors naturels pour les tournages, des budgets pour la production, des salles de cinéma et un marché local et international. Or, pour cela, une visibilité surtout, dans les grands festivals, est nécessaire. Et pour avoir cette visibilité à Cannes il est plus qu'impératif d'être présent dans ce mastodonte qu'est le marché du film et d'avoir pignon sur rue dans «le village international» qui regroupe des centaines de pavillons représentant la majorité des pays et des cinématographies du monde. Convaincu de cette nécessité, le Cnci (Centre national du cinéma et de l'image) ainsi que les deux syndicats des producteurs des courts et longs-métrages poursuivent sur la voie de la tradition qui s'est instaurée depuis quelques années concernant le pavillon tunisien et renouent avec la tradition de la présence tunisienne au sein du marché international qui regroupe plus d'un millier de stands représentant l'ensemble du cinéma mondial. Cette présence est d'autant plus nécessaire à Cannes qu'il est de plus en plus difficile, voire impossible, de réaliser un film sans la coproduction étrangère et sans avoir accès, le marché tunisien étant réduit, aux écrans étrangers entre petits et grands. Cela outre qu'on ne peut organiser un festival, à l'instar des JCC (Journées cinématographiques de Carthage), sans faire de prospections et de contacts dans les plus grands festivals du monde. La prochaine et 25e édition des JCC se déroulera du 1er au 8 novembre 2014 et sera désormais annuelle, avec un comité permanent. La Tunisie, terre de tournage C'est d'ailleurs là l'un des rôles du pavillon tunisien qui représente un point de rencontre entre les producteurs, les cinéastes et les directeurs de festival de par le monde. Affiches et catalogues des films tunisiens les plus récents, 2013 et 2014, sont proposés à tous ces professionnels. Adnane Khedher, directeur du Cnci, affiche sa satisfaction quant à la participation tunisienne qui, selon lui, ne peut être que porteuse de fruits. Et il s'en explique : «Je suis vraiment satisfait que la Tunisie soit représentée sur la Croisette. Certes, notre pays connaît actuellement une crise financière, mais on le sait, l'image et la communication sont capitales pour avoir une visibilité afin que nous puissions concrétiser des coproductions et des prestations de services pour que notre pays redevienne terre de tournage, d'où le thème de notre participation. Et il faut que tous les efforts des responsables concernés se conjuguent pour réaliser cet objectif. Car sachez que le but de la première participation tunisienne à Cannes, il y a trois décennies, n'était autre que de promouvoir le tourisme. Or, nous avons sollicité le ministère du Tourisme pour un sponsoring du pavillon et du stand, ce qui aurait permis la promotion du tourisme, également, en vain. Or, c'est dommage car la promotion est le nerf de toute action ou activité économique. Je vous cite un exemple, on a demandé à Rockefeller : ‘S'il ne vous restez plus qu'un dollar comment le partagerez-vous ? Ce à quoi il a répondu : ‘ Je mettrai 10 cents pour l'investissement et 90 cents pour la promotion.' Je me demande alors pourquoi au ministère du Tourisme ils n'ont pas eu la présence d'esprit et l'intelligence de profiter de ce rendez-vous mondial pour faire la promotion du tourisme tunisien». Ces propos d'Adnane Khedher ne sont pas des propos en l'air, puisque le pavillon tunisien a enregistré un très grand nombre de visiteurs, «même des Chinois qui ont souhaité établir une coopération pour l'organisation de plusieurs manifestations cinématographiques et pour montrer les films tunisiens en Chine». Concernant notre participation au marché du film, le directeur du Cnci souligne : «C'est la première fois que nous renouons, depuis deux décennies au moins, avec notre présence au marché, car vous le savez, Cannes c'est d'abord et avant tout le marché du film et on ne peut zapper ce grand rendez-vous des industriels du cinéma, entre producteurs et distributeurs». Et de poursuivre : «Outre le pavillon et le stand au marché du film, le Cnci a participé aux ateliers des ‘Producer-networks', en donnant la possibilité a deux jeunes producteurs, Malik Kochbati et Mohamed Ali Ben Hamra, qui ont été choisis par une commission de producteurs tunisiens de boucler les financements de leurs prochaines productions. Nous avons également fait appel à trois jeunes qui ont été sélectionnés pour tenir le stand du marché et le pavillon. Le Cnci formera une équipe permanente de jeunes afin de participer à ce genre de manifestations professionnelles. D'ailleurs, c'est en étroite collaboration avec les deux syndicats des producteurs, représentés dans un comité mixte, que le Cnci s'est tracé cette voie afin d'ancrer davantage notre participation dans un marché aussi important, porteur et promouvant que Cannes» Kaïs Zaed, un jeune qui tient le stand du marché du film, ne cache pas sa satisfaction : «Nous avons eu beaucoup de contacts de la part des Asiatiques qui sont intéressés par les films tunisiens pour les programmer dans leurs festivals. Des promesses de ventes ont été faites notamment pour ‘Challat' produit par Habib Attia et qui est soutenu par l'Association cinéma indépendant pour sa diffusion, ainsi que ‘Bastardo' produit par Imed Marzouk. D'autres distributeurs comptent acheter les droits de distribution sur Internet de certains de nos films, produits en 2011 et 2012». Il est sûr que pareilles transactions dans les festivals les plus importants du monde, entre achats, ventes et promotions, contribuent de manière évidente à développer le cinéma tunisien et à le rendre plus visible à l'échelle internationale.