Le ministère des Affaires religieuses reprend en main 98 mosquées Comment un imam peut-il aborder des questions politiques du haut de la tribune de prêche sans porter atteinte au principe de neutralité du lieu de culte ni tomber dans le piège des querelles politiques. Cette équation a meublé le débat à la journée d'étude sur «la neutralité des mosquées», tenue hier à Tunis. Les participants ont souligné, dans leurs interventions, la nécessité d'un plan cohérent destiné à assurer la neutralité des mosquées, à les mettre hors d'atteinte de la propagande partisane et politique et surtout à ne pas les utiliser comme facteurs de tension et de discorde entre les enfants d'un même peuple, d'autant que seuls quelques mois séparent le pays d'élections décisives. Pour le secrétaire général du Parti du travail patriotique et démocratique, Abderrazak Hammami, «assurer la neutralité des mosquées ne se limite pas à les affranchir de l'emprise des islamistes radicaux et des terroristes, mais consiste aussi à les libérer de la mainmise des partis politiques». Le président de l'Observatoire arabe des religions et des libertés, Mohamed Haddad, a estimé de son côté que l'insuffisance des effectifs d'encadrement des mosquées et les postes laissés vacants dans «les mosquées libérées» pourraient ouvrir la voie à l'intervention de certaines parties prenantes politiques pour la nomination d'affidés dans ces mosquées. La journée d'étude se tenait à l'initiative de l'Observatoire arabe des religions et des libertés, avec le concours de la Fondation Konrad-Adenauer (Allemagne), dans le cadre d'une série de conférences d'évaluation placées sous le signe: «Où en sommes- nous?». Rétablir l'autorité Le ministère des Affaires religieuses a pu reprendre en main 98 mosquées qui échappaient à son contrôle et où y officiaient des extrémistes depuis le déclenchement de la révolution, a déclaré le chef de cabinet du ministre des Affaires religieuses, Abdessattar Badr. Intervenant, hier, lors d'une journée d'étude, à Tunis, sur le thème « Où en sommes-nous ... neutralité des mosquées », M.Badr a expliqué que le ministère entend rétablir son autorité, d'ici fin juin 2014, sur les mosquées et les tribunes de prêche sous contrôle d'extrémistes, afin d'instaurer un climat favorable en prévision des prochaines élections. Il y a trois mois, 150 lieux de culte étaient hors contrôle de l'Etat, a-t-il précisé, ajoutant que le ministère a privilégié la voie du dialogue pour les récupérer, avant de mettre en place une stratégie claire fondée sur une approche participative. Cette stratégie prévoit notamment la création d'une commission régionale dans chaque gouvernorat présidée par le gouverneur et composée des représentants des autorités sécuritaires et judiciaires ainsi que des prédicateurs. Ces commissions régionales sont appelées à actualiser, de façon périodique, le nombre des mosquées échappant au contrôle du ministère et à identifier la menace potentielle, a indiqué Abdessatar Badr, notant, à ce propos, que le remplacement des places vacantes demeure une problématique à résoudre dans les mosquées récupérées devant le manque de cadres religieux qualifiés et la réticence des imams pour assumer cette responsabilité. Le ministère veille à s'inspirer des expériences de certains pays islamiques dans la gestion des mosquées et leur préservation des courants extrémistes, a-t-il souligné, annonçant la décision du roi du Maroc, actuellement en visite en Tunisie, de prendre en charge la formation de 100 prédicateurs religieux tunisiens pendant une année dans un institut marocain de formation des imams, et ce, à partir de septembre 2014.