Le ciel rougit, les rues sont silencieuses et désertes ; à l'heure de la rupture du jeûne à La Marsa il n'y avait que des chats dans les rues samedi dernier. Pas un taxi en vue près du centre commercial le Zéphyr, d'ordinaire entouré de voitures jaunes. A quelques pas de là, sur la plage, des familles sont venues rompre le jeûne au bord de l'eau. Wahid Khemiri a installé une nappe sur un petit muret avec sa femme et ses deux filles, Doha et Ranim. C'est la première fois qu'ils viennent manger dehors pendant Ramadan : «Les petites veulent nager et c'est agréable de venir ici», dit-il. Ils sont venus du Bardo pour profiter des derniers instants de la lumière du jour. Plus près de l'eau, sur le sable, la famille Hassan a apporté des sièges et plusieurs glacières pour transporter la nourriture. Ils profitent du week-end pour aller à la plage: «On vient pour se distraire», dit Hajer, qui déguste une «marqet loubia», un ragoût de haricots blancs. Venir sur la plage le week-end permet de casser la routine : «Après une semaine à la maison, ça fait du bien de sortir», dit le gérant d'un restaurant sur l'Arcade de La Marsa. Pour Ramadan, il a installé une machine à crêpe au bord de sa terrasse : «Les gens veulent manger du sucré après le repas en famille», explique-t-il. Dans les cafés et restaurants d'alentour, toutes les chaises sont occupées et tournées vers les écrans qu'ont installés les restaurateurs : les hommes regardent les matchs de football de la Coupe du monde ou les séries tunisiennes diffusées spécialement au mois de Ramadan. Le Saf-Saf, restaurant culturel de La Marsa Vers 21h00, le célèbre restaurant le Saf-Saf commence à se remplir. Dans la grande cour intérieure, quelques familles de touristes et de Tunisiens dînent près du grand peuplier qui a donné son nom au restaurant. Fedia, le dromadaire femelle, est l'attraction près de l'entrée, elle reste impassible malgré les enfants qui s'agitent autour d'elle, fascinés. A l'intérieur, Elyès, un habitant de La Marsa, joue au «chiche biche» comme tous les soirs ; «c'est un échauffement avant les échecs, on joue jusqu'à trois heures du matin», raconte-t-il. Georges Bismuth, un Français très connu, aujourd'hui à la retraite, boit le thé avec son ami Samir. «Petit, je venais avec mon grand-père qui me racontait qu'il venait lui-même avec son grand-père», s'amuse à se souvenir Georges, qui doit hausser le ton lorsque l'appel à la prière se propage dans toute la ville. «C'est un lieu qui a beaucoup d'histoire, confirme M. Hakim Bahri, directeur du Saf-Saf, ici les gens de tous horizons se rencontrent dans une symbiose parfaite». Shopping et tourisme autour de l'Arcade de La Marsa Il devient difficile de circuler le long de l'Arcade de La Marsa vers 23h00. Les femmes déplient les djellabas qu'une boutique installées sur des tables au milieu du passage ; les enfants crient et courent en se frayant un chemin entre les adultes. Sinda, Soulaïma, Ribah et Karima regardent les tongs, baskets et autres chaussures : «On profite du week-end pour venir faire du shopping», expliquent ces habitantes de La Marsa. Dans un café, quelques touristes sont attablés comme Rob, un Américain venu étudier l'arabe à Sidi Bou Saïd : «J'adore l'ambiance ici le soir, je viens fumer le narguilé ou prendre un thé», raconte ce professeur d'histoire qui parle l'arabe couramment. «La Tunisie est le pays le plus reposant du monde arabe», affirme ce New-Yorkais qui a beaucoup voyagé. Vers minuit, les taxis sont partout dans les rues de La Marsa qui ne se reposeront qu'à partir de 3 heures du matin, au début d'une nouvelle journée de jeûne pour les Tunisiens.