En Tunisie, les soldes constituent une tradition récente qui perd de ses couleurs au fil des ans. La période des soldes fait-elle, toujours, le bonheur des commerçants et des férus de shopping ? Deux semaines se sont écoulées depuis le démarrage des soldes d'été ; une technique de marketing prisée dans le monde entier en raison de ses répercussions positives tant pour les commerçants que pour le consommateur. Les premiers se réjouissent de pouvoir liquider la marchandise restante de la nouvelle collection mais aussi des collections de l'année d'avant. Quant au consommateur, il s'adonne au shopping en ayant la conviction de faire de bonnes affaires. En Tunisie, les soldes constituent une tradition récente qui perd de ses couleurs au fil des ans. La baisse du pouvoir d'achat et la méfiance de certains Tunisiens quant à la transparence de cette pratique commerciale en sont les principales causes. Aussi, les bousculades au-devant des boutiques de prêt-à-porter et du cuir et chaussures font-elles partie du passé. L'activité commerciale dans le centre-ville de Tunis semble anodine, en ce samedi 30 août. A l'exception des affiches et des graffitis spécial soldes, garnissant les vitrines, rien ne laisse deviner un évènement commercial. Mlle Ghofrane Hagui, jeune urgentiste, examine les chaussures et les sacs à main proposés par une boutique de cuir et chaussures, située au centre-ville de Tunis. Elle ne se présente pas comme une férue de shopping et encore moins comme une accro à la mode. Pour elle, la tactique des soldes est claire : «Généralement, les produits soldés sont de moyenne gamme. Certes, le choix y est, mais les prix restent tout de même assez salés. Ce qui est certain, c'est que — et contrairement à leur principe — les soldes sont tout au profit des commerçants qui finissent par liquider leur marchandise à des prix élevés. Mais pour le consommateur, profiter des soldes pour faire de bonnes affaires n'est point évident», souligne-t-elle. Sous un soleil de plomb, Ahmed et Manel se promènent à l'avenue Bourguiba, les mains chargées de sachets. Ce couple sera uni pour le meilleur et pour le pire le 1er octobre prochain. Manel a, donc, préféré profiter des soldes pour parachever son trousseau à moindre coût. «Je pense que les soldes sont intéressants du moment où l'on compte acheter plusieurs produits. Les remises cumulées allègent quelque peu les dépenses. Dans ce cas, il s'agit d'une question de calcul et non d'estimation non fondée», indique-t-elle souriante. Pour une politique commerciale fondée sur le principe de solidarité Cependant, acheter plusieurs produits s'avère être une véritable utopie pour bon nombre de Tunisiens qui ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts. Mme Monia, employée dans une administration et mère de trois enfants, souhaiterait tant renouveler sa garde-robe et celle de sa famille. Un désir qui reste inassouvi, faute de moyens. «Les commerçants devraient prendre en considération la baisse significative du pouvoir d'achat et procéder non pas à des remises de 20% ou de 30% mais à des remises plus tentantes. Il s'agit d'une politique commerciale fondée sur le principe de la solidarité qu'il conviendrait d'appliquer. Pour une famille, argumente-t-elle, il devient difficile, de nos jours, d'arrondir les fins de mois. D'autant plus que les dépenses relatives à Ramadan, à l'Aïd et à la rentrée scolaire nous obligent à faire prévaloir les dépenses nécessaires». Pas d'argent, pas de shopping ! La baisse du pouvoir d'achat impacte, manifestement, le rendement des soldes d'été. Les commerçants le savent pertinemment. A la frustration des uns correspond la déception des autres. Mme Olfa Chagraoui, gérante dans une boutique de cuir et de chaussures, estime que les soldes d'été 2014 sont sensiblement meilleurs que ceux de l'année précédente. Toutefois, les recettes, elles, restent bien en deçà des objectifs escomptés. «L'affluence des clients s'est limitée aux dix premiers jours. L'activité commerciale a repris son rythme coutumier. C'est probablement à cause du manque de pointures moyennes», suppose-t-elle. Pour liquider des produits relevant de la collection 2013/ 2014, Olfa recourt à des remises de 50% pour les chaussures et de 30% pour les sacs à main. Aussi, les prix des mules et des chaussures varient-ils entre 14d5 et 54d,5. Quant aux prix des sacs, ils oscillent entre 41d,3 et 62d,3. Un peu plus loin se trouve la boutique de Mohamed, commerçant de prêt-à-porter féminin et de vêtements pour enfants. Malgré des réductions de 30% sur tous les produits proposés, la demande reste timide. «Cette année, les soldes sont encore plus décevants que ceux de l'année précédente. Les Tunisiens sont à bout de souffle. Ils ne tarderont pas à dépenser ce qui reste du budget estival pour faire l'acquisition des fournitures scolaires. Néanmoins, certaines clientes continuent, tout de même, à profiter des remises opérées sur les robes qui sont très à la mode», indique-t-il. Faute de moyens, bon nombre de consommateurs ont tendance à ne plus s'attarder sur la qualité. Seul le prix le plus abordable que possible compte désormais. C'est du moins ce qu'a remarqué Karima, gérante d'une boutique de prêt-à-porter féminin.
