Après la décision de la Haica, il est à parier que tous ceux qui prennent la parole feront davantage attention quant aux lignes parfois ténues qui séparent l'apologie du terrorisme de la simple liberté d'expression Dimanche 5 octobre, Samir El Wafi présente son émission hebdomadaire. Sur le plateau, Nasreddine Ben Hadid, journaliste, avance qu'Abou Yadh est son ami. Conséquences : Ben Hadid a été convoqué hier par le ministère public auprès du Tribunal de première instance, pour sa déclaration sur antenne visant le N°1 d'Ansar Echaria, l'un des fugitifs les plus recherchés par la police tunisienne. Et l'émission suspendue. Depuis la polémique fait rage. Le talk show politique qui passe en prime time mais non en direct et qui fait grimper l'audimat de la chaîne a été dans le viseur de la Haica, l'instance de régulation de l'audiovisuel, et interdit d'antenne pendant un mois, soit quatre fois, étant hebdomadaire. Colère de Samir El Wafi, producteur et présentateur de ladite émission, qui a déclaré qu'un arrangement avait été trouvé avec le président de l'autorité de tutelle, Nouri Lajmi, selon lequel le présentateur devrait faire une mise au point lors de l'émission suivante. Mais la Haica, après avoir auditionné Samir El Wafi, aurait peut-être décidé que compte tenu de la sensibilité de l'étape, la sanction doit être exemplaire. D'autant que la chaîne supporte un cumul de dérapages à travers ses différents programmes, et qu'elle n'en est pas à sa première sanction. «Andi ma Nkolek» (J'ai à te dire), une téléréalité qui étale la misère des gens sans aucune pudeur, est aussi passée par-là. Ce n'est pas un direct Le problème qui se pose, c'est le type même du programme objet de la polémique, « A celui qui ose seulement», qui n'est pas direct mais enregistré. Donc la responsabilité de la chaîne est totale. Si c'était un direct, il aurait été difficile de rattraper un débordement d'un invité seulement après coup. Mais l'émission est enregistrée et pendant le montage, le producteur tout comme le réalisateur et le (a) scripte sont présents. C'était le moment de sortir les ciseaux. Cela n'a pas été fait. Ben Hadid a le droit d'avoir les opinions et les amitiés qu'il veut. Le problème c'est que toutes les opinions ne sont pas bonnes à dire, à un moment de grande écoute, sur une chaîne de télévision. Après la décision de la Haica, il est à parier que tous ceux qui prennent la parole feront davantage attention quant aux lignes parfois ténues, il est vrai, qui séparent l'apologie du terrorisme, de la simple liberté d'expression. Mais il s'agit-là d'une question d'ordre juridique et éthique. Elle relève aussi du respect dû à nos soldats, à leurs familles et à tous ceux qui s'estiment menacés par le terrorisme. C'est-à-dire la majeure partie de la société tunisienne. Tout média est responsable de ce qu'il diffuse, c'est un principe universel. Même en démocratie, il y a des lignes rouges. La seule chose, c'est qu'on a le droit de les contester, mais devant la justice et les juridictions d'appel.