Par M'hamed JAIBI Pour être bon, le futur gouvernement devra, incontestablement, répondre à diverses considérations consensuelles, en mesure de rassembler sur un même programme de reconstruction l'écrasante majorité des parlementaires. Mais il se devra également de répondre à certaines exigences en liaison avec la majorité présidentielle sur laquelle il compte s'adosser, laquelle s'attache à consolider le projet de société moderniste qui fait l'attrait du site Tunisie. Une courte majorité que représentent à l'Assemblée, autour de Nida Tounès, pas moins de trois autres groupes parlementaires : le Front populaire, Afek Tounès et l'Union patriotique libre. Ces deux types de considération compliquent le casting et rendent les négociations fort complexes. D'une part, il s'agit d'éviter que Nida Tounès ait les trois présidences ou, tout au moins, faire en sorte que l'éventuel candidat de Nida Tounès au poste de chef de gouvernement soit une figure très consensuelle ou perçue comme telle, aussi bien par Ennahdha que par le FP, AT et l'UPL. Autre aspect problématique qui n'avait pas été anticipé au sein de Nida Tounès, c'est l'idée de Béji Caïd Essebsi de voir les députés de son parti se consacrer à leur mandat électif et ne pas briguer de responsabilités ministérielles. Idée qui n'a pas l'air de charmer les quelques ténors qui siègent à l'Assemblée. Enfin, la cogitation sur la composition du gouvernement nécessite d'établir un équilibre acrobatique entre les objectifs sociaux liés au développement régional et à la redistribution des fruits de la croissance, et les indispensables mesures que motivent les objectifs de relance substantielle de la croissance et de l'emploi. Le pays s'est beaucoup endetté depuis la Révolution et a alourdi considérablement son déficit budgétaire. En regard, les institutions financières internationales s'inquiètent, craignant que leur client solvable — la Tunisie — ne mette la clé sous le paillasson. D'où un certain nombre de «recommandations» contraignantes en matière de réformes de structures : compression des dépenses publiques, réforme du système bancaire... Des options que Afek Tounès accepte et défend, et que le Front populaire combat avec acharnement, lui qui base son programme économique sur l'annulation des dettes. Or, homme de compromis, le président Caïd Essebsi tient à ne mécontenter personne, en un programme de gouvernement équilibré qui sache relancer le pays, tout en répondant aux attentes multiples que la Révolution a mises au jour. Un vaste programme stratégique de stabilisation, de reconstruction et de réformes qui gagnerait à mobiliser, de manière sincère et effective, absolument toutes les forces politiques, sociales et associatives du pays, ainsi que les entreprises et les citoyens.