Par Abdelhamid Gmati Le premier jour du mois d'avril amène son lot de canulars spécialement dans les médias internationaux et les réseaux sociaux. A ce jeu de l'humour, les Tunisiens ne sont en reste et donnent libre cours à leur imagination. Le résultat n'est pas toujours heureux mais l'essentiel est de sourire. Ainsi, on a inventé une grande opération policière dans un lieu inexistant débouchant sur l'arrestation et l'élimination des grands chefs du terrorisme ; et on nous a annoncé le retour de l'ex-président Ben Ali pour la fin du mois d'avril, celui de son épouse étant encore à négocier. Mais si ces « blagues » sont anodines, il est d'autres comportements tout au long de l'année moins innocents. Quelques exemples, ces derniers jours : des personnes, voire des personnalités, défilent dans les médias et sur les plateaux télé et radio pour... brasser du vent, se mettre en valeur et justifier leurs invitations. La marche républicaine de dimanche dernier avait comme objectif de mobiliser le monde entier autour du peuple tunisien pour dénoncer le terrorisme. Elle était républicaine, c'est-à-dire qu'elle réunissait tous les Tunisiens, avec leurs différences idéologiques, politiques, sociales, religieuses. Il y avait des jeunes, des moins jeunes, des femmes, des enfants, des musulmans, des chrétiens, le grand rabbin de Tunis, des représentants de tous les partis politiques à l'exception du Front populaire qui a choisi de s'exclure lui-même à défaut d'exclure les islamistes... Il y avait même un non-voyant et un handicapé sur son fauteuil roulant... Et on a invité des personnalités de pays différents, aux systèmes politiques différents... Le défi était de réunir ces dizaines de milliers de personnes dans un seul endroit et de garantir leur sécurité et le bon déroulement de la manifestation. De fait on n'a déploré aucun incident, aucun attentat, aucun acte de violence ou de malveillance. De ce point de vue, ce fut une réussite et ce fut salué ici et ailleurs. Cela n'a pas empêché certaines voix « bien intentionnées » de clamer que « le protocole était défaillant », qu'« une grande gabegie a régné lors de cette marche VIP », que « le service de sécurité n'est pas compétent », que « cette marche est une supercherie. Durant cette cérémonie d'hommage, un chœur de 40 chanteurs dans la pure tradition soufie tunisienne, a récité, en hommage aux victimes, un émouvant «Hizb Latif », prônant la paix, la tolérance et la miséricorde. Cela n'a pas été relevé mais on a déploré que les drapeaux des pays des victimes ne soient pas exhibés en hauteur. Plus haut que la stèle commémorative ? Une pointe d'humour s'est glissée durant cette marche lorsque le président Caïd Essebsi a commis un lapsus remerciant le président français François Mitterrand au lieu de François Hollande. Il s'est rapidement repris en invoquant son âge et en donnant l'accolade a son hôte. Celui ci s'est amusé et aurait même répondu à un journaliste : « ça peut arriver et d'ailleurs le président Habib Bourguiba a été réactif et m'a embrassé ». Nos observateurs de service ont, eux, parlé de « sénilité », de « comportement indigne », etc. Sur les plateaux de télévision les commentateurs de service s'en sont donné à cœur joie. Certains déploraient que cette marche n'a rien donné, n'a pas été suivie d'effet, etc. Pourtant, on apprenait que l'Europe s'engage à soutenir la Tunisie dans la lutte contre le terrorisme et dans son effort de développement et que la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) a accordé à la Banque de Tunisie (BT) un prêt d'une valeur de 30 millions d'euros, l'équivalent de 63 millions de dinars (1 euro= 2,1 dinars), pour soutenir les micro, petites et moyennes entreprises (MPME) en Tunisie. Un autre expert affirmait que les autorités tunisiennes n'ont rien fait pour solliciter la Chine. Pourtant, dès lundi, le président de la Commission nationale chinoise pour le développement et la réforme (NDRC), Zhneg Ping , annonçait que les projets mixtes tuniso-chinois dans les domaines de l'infrastructure de base, du transport ferroviaire des produits industriels et des voyageurs ont démarré. A l'issue d'un entretien qu'il a eu, en compagnie de la délégation l'accompagnant, avec le chef de l'Etat tunisien, Béji Caïd Essebsi, le responsable chinois a ajouté que les projets concernent également la lutte contre la pollution dans plusieurs régions tunisiennes. Ce ne sont là que quelques exemples des comportements de ces Cassandre « qui ne mangent pas de pain », c'est-à-dire qui ne demandent aucun effort physique, intellectuel ou financier. Quels sont leurs objectifs à vouloir tout dénigrer ? On serait tenté de leur adresser l'invite du président Essebsi aux journalistes qui voulaient outrepasser le cordon de sécurité autour de la délégation officielle : « Foutez-nous la paix, quand même, merde ».