Après s'être attaquée aux pionniers du JPF, voilà que la Grande faucheuse a jeté son dévolu sur la génération des septuagénaires. Sa dernière victime en date, notre confrère, Moncef Chelli. Journaliste de talent, il a nous a gratifiés dans les années 2000 d'une émission hebdomadaire El Mindhar qui avait séduit très vite les téléspectateurs par son ton libre, ses sujets audacieux, iconoclastes qui détonnaient dans le paysage audiovisuel tunisien, transgressant ainsi le politiquement correct alors en vigueur. Cela nous a valu de grands moments télévision chaque lundi (si mes souvenirs sont bons). Il faut se mettre dans le contexte de l'époque. Les journalistes devaient éviter les débats politiques, les sujets qui risquaient de démoraliser les Tunisiens, et même les accidents de la voie publique et les faits divers. On tenait à accréditer l'image d'Epinal d'une Tunisie paisible et sans problèmes, malgré un environnement instable, notamment la montée de l'islamisme. Moncef Chelli a eu l'audace d'évoquer des problèmes de société dont personne n'osait traiter comme l'usage de la drogue dans dans le milieu scolaire, le scandale du sang contaminé qui toucha de nombreux pays y compris la Tunisie. Je l'ai perdu de vue depuis une vingtaine d'années mais je garde de lui le souvenir d'un homme d'un commerce agréable, doté d'un grand sens de l'humour et surtout d'un très bon journaliste.