Cinq modèles pour un groupe: diversité stratégique ou dispersion ? Derrière l'unité affichée des BRICS se cache une grande diversité de modèles économiques, façonnés par des trajectoires historiques et des choix politiques singuliers. • La Chine repose sur une économie de marché à pilotage étatique, combinant puissance manufacturière, investissements massifs et montée en gamme technologique. Cette stratégie lui a permis d'asseoir sa place comme atelier du monde tout en amorçant un recentrage vers la consommation intérieure. • L'Inde privilégie une économie de services en forte expansion, portée par les technologies de l'information, les services financiers et une démographie dynamique. Si cette orientation génère une croissance rapide, elle laisse subsister des défis considérables en matière d'infrastructures et de développement rural. • La Russie, fidèle à un modèle rentier, demeure largement dépendante de ses ressources énergétiques et minières. Cette exposition aux fluctuations des marchés mondiaux freine sa diversification, malgré un socle industriel hérité de l'ère soviétique. • Le Brésil affiche une structure plus équilibrée, entre secteur tertiaire robuste, agriculture performante et vaste marché intérieur. Toutefois, son potentiel est freiné par des inégalités persistantes, une bureaucratie pesante et une instabilité politique chronique. • L'Afrique du Sud associe richesse en ressources naturelles et secteur financier développé, mais voit ses ambitions entravées par une croissance modérée et des fractures sociales profondes. Croissance à deux vitesses: moteurs et maillons faibles Cette diversité se reflète dans les performances économiques du groupe. En 2025, la Chine (5,5 %) et l'Inde (6,2 %) tirent le bloc vers le haut, attirant capitaux et innovation. À l'inverse, la Russie, le Brésil et l'Afrique du Sud peinent à maintenir un rythme soutenu. Sanctions internationales, dépendance aux matières premières, instabilité ou fragilité institutionnelle expliquent cette dynamique à deux vitesses, souvent qualifiée de « falling behind ». Ces écarts soulignent un paradoxe central : la diversité qui fonde la légitimité globale des BRICS constitue aussi leur principal défi. Les disparités en matière de ressources, de développement humain et de stratégies économiques rendent difficile la formulation d'une vision commune. Dans ce contexte, le sommet de Rio interroge la capacité du groupe à dépasser ses lignes de fracture pour peser collectivement sur les grands équilibres économiques mondiaux. Proposer une alternative crédible à l'ordre international existant suppose non seulement une volonté politique partagée, mais aussi une convergence minimale des priorités économiques. A suivre Télécharger le document intégral
Elyes Ghariani Ancien ambassadeur Lire aussi Elyes Ghariani : Les BRICS, entre émergence et redéfinition de l'ordre international Elyes Ghariani - Rappel historique: L'affirmation progressive des BRICS sur la scène internationale (2001–2025) BRICS - Contexte géopolitique du sommet de Rio (2025) : Entre multipolarité et confrontation Portraits croisés des BRICS : Ambitions, divergences et rapports de force