L'économie tunisienne peine toujours à quitter la zone de turbulences malgré les réformes entreprises par le gouvernement de Chahed. L'expert en gestion des risques financiers, Mourad Hattab, a dressé à Radio Med, un tableau noir de l'économie tunisienne et son impact négatif sur la structure sociale. « C'est une économie sclérosée, dépourvue totalement d'un système productif, et qui s'est tournée vers des importations massives ». L'expert a déploré, particulièrement, ce recours excessif à l'endettement et mis en garde contre le risque encouru par la Tunisie de perdre sa souveraineté pour peu que rien ne soit fait pour arrêter l'hémorragie « On propage des idées pour dire qu'on s'endette pour payer les salaires, je leur dirais non le Tunisien ne perçoit pas son salaire en dollar, mais les prêts sont destinés à l'importation notamment les glibettes, les médicaments cancérigènes, le fer et les pièces détachées adaptables. Cette importation anarchique et mal organisée n'obéit pas aux normes internationales et nuit plus que le commerce parallèle » L'expert en gestion des risques financiers, Mourad Hattab, a souligné, que la Tunisie est en crise réelle en témoigne la détérioration du pouvoir d'achat de 1,3 million de citoyens qui continuent à souffrir de la malnutrition en raison de l'explosion des prix des produits alimentaires. C'est les prémices de la famine. Les prix ont augmenté presque de 4 fois. Le taux de pauvreté va sans doute s'aggraver avec la dégradation de la situation économique et sociale. L'approche des ministères de l'agriculture et du commerce est à revoir. Estimée en 2010 à 70% de la population, la classe moyenne en Tunisie serait en régression. Mais avec un taux d'inflation élevé et des indicateurs économiques dans le rouge, le pouvoir d'achat en Tunisie périclite. La paupérisation est en train de bouleverser l'édifice social de la classe moyenne que l'Etat-providence a légué en héritage. Cette classe moyenne est menacée avec l'apparition de nouveaux pauvres au sein de cette classe largement composée des fonctionnaires. » Fitch Ratings abaisse la note de la dette de la Tunisie La Tunisie envisage de recourir pour la énième fois au marché de la dette internationale. La Tunisie est-elle prête à aller s'endetter sur les marchés internationaux sans risques ? « En un laps de temps, la Tunisie s'est transformée en un pays extrêmement déficitaire sur le plan commercial et des paiements extérieurs, mais aussi, au niveau des finances publiques. Entre les années 2011 et 2016, le déficit budgétaire a doublé, passant de 3 à 6% et pourrait atteindre jusqu'à 7%, en 2017 », a souligné l'expert en gestion des risques financiers, Mourad Hattab, à l'émission Prime Time, à Radio Med « Depuis 2011 et jusqu'à maintenant, la Tunisie a eu recours à 35 crédits extérieurs, pour une valeur de près de 30 milliards de dinars, afin de pallier cette situation. Notre ratio d'endettement a doublé, il est estimé à 85% du PIB, compte tenu de l'endettement du secteur public. L'Etat tunisien est incapable de rembourser actuellement ses dettes. Les crédits sont d'une échéance très courte, oscillant entre 4 et 6 ans et nous coûtent très cher » Faut-il s'adresser aux marchés financiers internationaux ? La Tunisie reste à la merci de l'opinion par les agences de notation. Fitch Ratings a abaissé, vendredi, d'un point, la notation tunisienne de "BB-" à "B+" avec perspective stable, suite à la baisse de l'activité du secteur touristique et du ralentissement de l'investissement. L'agence justifie cette dégradation de la notation par "la chute du tourisme dans un contexte de risques de sécurité élevés, le ralentissement de l'investissement en la présence des fréquents changements de gouvernement et des épisodes de grèves ont affaibli la croissance et les perspectives économiques. Le pays aura besoin, en 2017, d'emprunter sur les marchés étrangers l'équivalent de 7% de son PIB pour faire face à ses échéances et aux besoins de son budget", estime Fitch Ratings. Mourad Hattab souligne que « le recours à l'emprunt extérieur sans garantie américaine est un vrai risque. Hormis les doutes quant à l'inefficience des fonds mobilisés de l'extérieur, le risque de surendettement existe toujours. Cet emprunt extérieur d'un million d'euros n'autorise pas forcément un investissement rentable à moyen et long terme car les emprunteurs exigent des primes de risque plus élevées. Le taux d'intérêt sera élevé sans oublier les primes de risque. Ainsi le risque d'une situation de surendettement est réel. On s'attendait à un retour des investissements lors du dernier forum d'investissement baptisé ‘Tunisia 2020' les 29 et 30 novembre derniers. Ce fut plutôt une campagne médiatique. Les promesses ne sont pas toujours tenues. Seuls deux projets sont programmés (Enfidha et Medjerda) Le recours à la fiscalité résout-il le problème ?« Ce n'est pas la solution estime Hattab. La pression fiscale est déjà très forte en Tunisie en comparaison avec d'autres pays émergents. La règle immuable et universelle c'est que trop d'impôts tuent l'impôt » déclare Mourad Hattab à Radio Med.