L'ancien chef du gouvernement – le gouvernement de technocrates issu du dialogue national au cours de l'année 2013 après l'assassinat du martyr Mohamed Brahmi et le sit-in Errahil – a annoncé, au cours d'une conférence de presse, tenue hier à Tunis, le dépôt d'une autorisation officielle pour la création de son nouveau parti politique l'Alternative tunisienne (El Badil Ettounssi). Au cours de son discours d'annonce, Mehdi Jomaâ a expliqué que ce nouveau parti sera ‘centriste, réaliste, nationaliste, et, le plus important, démocrate'. Il a indiqué que l'aboutissement de ce parti est survenu suite à de grands travaux menés à travers le think-tank Tunisie Alternatives (créé il y a une année). El Badil Ettounssi axera, par ailleurs, ses actions sur des objectifs visant le renforcement des libertés, de l'Etat de droit et de la société du savoir. Un parti qui œuvrera, aussi, à rétablir la confiance entre les citoyens et la classe politique et ce afin que les jeunes et les femmes, surtout, arrachent leur place sur la scène et reprennent confiance en eux. Mehdi Jomaâ a beaucoup travaillé sur le suspense et le silence au cours des derniers mois ; presqu'aucune apparition officielle pour parler de son action politique. Contrairement aux autres acteurs politiques, il a préféré ne pas trop s'afficher afin de se préserver de toutes les grandes polémiques qui ne cessent de secouer le pays. Une stratégie qui a certes apporté ses fruits sur un moyen terme mais qui a, aussi, coûté un peu de crédibilité au concerné tout comme son histoire de vouloir, à la fin de son mandat à la Kasbah, se présenter à l'élection présidentielle comme cela a été révélé par l'ancien secrétaire-général de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), Houcine Abassi. Ce dernier a apporté de graves accusations à l'encontre de Mehdi Jomaâ qui n'y a toujours pas répondu. Ce silence laisse perplexe quant aux vraies motivations d'El Badil Ettounssi ; serait-ce là un nouveau parti politique ou une nouvelle machine électorale dont le but suprême est de faire parvenir Mehdi Jomaâ au palais ? Ce serait là le réel défi à relever par Jomaâ et son équipe qui utilisent un ton solennel quant au rétablissement de la confiance. Par ailleurs, l'appellation du parti impose, clairement, l'idée du parti messie qui vient sauver la Patrie de tous ses maux. Une lourde responsabilité relevant d'un monde utopique visé par des visages pas aussi nouveaux que l'on a bien voulu nous le faire croire...à l'image de l'ancien ministre de l'Intérieur Lotfi Benjeddou et compagnie. Quand Mehdi Jomaâ parle de réalisme, fait-il référence à un certain pragmatisme politique qui serait dénudé de toute idéologie ou vise-t-il plutôt une nouvelle logique politique réaliste où toutes les promesses électorales ne dépasseraient pas la réalité du concret ? Une question qui resterait probablement sans réponse jusqu'à la tenue des élections municipales. Des élections auxquelles prendraient probablement part El Badil Ettounssi vu le timing dans lequel il a été officialisé. Mehdi Jomaâ vient d'annoncer la naissance du 208e parti politique du pays et ses collègues tenteront, au cours des semaines à venir, de convaincre le large public de la différence que leur projet propose. Entre temps, nous continuons à ramer dans une scène aussi inefficace qu'intellectuellement déserte.