Le communiqué conjoint entre les mouvements de Nidaa Tounes et celui d'Ennahdha – et la création d'un haut comité de coordination entre les deux parties – n'ont pas fini de semer le chaos à l'intérieur de l'ancien mouvement majoritaire du pays. Au lendemain de la publication dudit communiqué, deux députés (Ridha Zghondi et Issam Matoussi) ont démissionné du bloc parlementaire du mouvement alors que vingt-et-un coordinateurs régionaux ont publié un communiqué hostile au premier. Les coordinateurs régionaux signataires du texte ont estimé que le communiqué conjoint intervient à un moment douteux et qu'il ne se base sur aucune raison valable. Qualifiant la manœuvre entre les deux mouvements comme étant une humiliation et une déviation des principes sur lesquels a été fondé Nidaa Tounes, ils ont alarmé sur l'usurpation des vrais fondateurs du mouvement et leur remplacement par des individus inconnus et étrangers au Nidaa. Ce communiqué au ton sévère a été suivi par un appel à une réunion dans la ville de Sousse. Anticipant l'événement, le clan de Hafedh Caïd Essebsi a appelé, à son tour, à une réunion des coordinateurs régionaux au siège du mouvement, au Berges du Lac à Tunis. Du coup, dimanche 11 juin a connu deux réunions ; l'une s'est tenue à Sousse entre des députés et des coordinateurs régionaux et, l'autre, à Tunis entre Hafedh Caïd Essebsi, Sofiene Toubel et, encore une fois, des coordinateurs régionaux. Les deux réunions parallèles n'ont pas encore abouti à des communiqués officiels. Toutefois, l'un des présents à la réunion de Sousse nous a expliqué que les participants se sont mis d'accord sur l'urgence d'intervenir afin que cesse le monopole des prises de décisions de la part du directeur exécutif du mouvement (HCE) et du président du bloc parlementaire, Sofiene Toubel. ‘Le groupe de Sousse' serait sur le point de prendre des mesures urgentes et sérieuses afin de ‘redresser la ligne politique et idéologique du mouvement'. De leur côté, le camp de Hafedh Caïd Essebsi tente de récupérer le maximum des coordinateurs régionaux dont un bon nombre d'entre eux ont été, pendant un moment, le support principal pour le fils du président de la République dans son ascension partisane. Donc si le groupe des coordinateurs régionaux réunis dimanche à Sousse venait réellement à annoncer sa rébellion contre Caïd Essebsi junior, ce dernier serait sérieusement affaibli et pourrait se retrouver à la tête d'un mouvement fantôme. Si la nouvelle révolution venait à aboutir à du concret, cela pourrait inverser la tragédie que vit Nidaa Tounes depuis plus de deux ans. En effet dans le cas où le mouvement connaitrait une réelle rectification de sa ligne politique et la mise à niveau de ses structures et de ses objectifs, il pourrait renaître de ses cendres, marquer à nouveau ses distances avec son ennemi naturel (son allié d'aujourd'hui) et, pourquoi pas, relancer son parcours et aller jusqu'au bout de ce pourquoi il a été fondé. Entretemps, ce qui s'y passe actuellement relève, encore une fois, du surréalisme entre manigance bas de gamme et opportunisme.