Il a fallu une longue période pour que les politiciens au pouvoir se décident enfin pour agir et pour penser un peu à l'avenir du pays, pour voir que beaucoup de dirigeants ne sont pas à la hauteur des postes qu'ils occupent. Il a fallu le courage du chef du gouvernement, Youssef Chahed, qui a demandé le limogeage de Chedly Ayari, et tous les Tunisiens espèrent que le même sort soit réservé à de nombreux responsables d'entreprises publiques qui accumulent, impunément, les déficits et les pertes. Ainsi, la plénière de jeudi 15 février, à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) portera sur la demande du président de la République sur la proposition pour mettre fin à la mission du gouverneur de la banque centrale de Tunisie (BCT), Chedli Ayari, prévue dans la matinée, et la proposition de désigner Marouene Abassi à sa place, dans l'après-midi. Le bilan de Chédly Ayari n'est pas reluisant, depuis son arrivée à la tête de la BCT, succédant à Mustapha Kamel Nabli qui, pourtant n'avait pas démérité. Certes, Ayari bénéficiait du soutien des composantes de la Troïka (LeCongrès pour la République – CPR – de Mohamed Moncef Marzouki, d'Ennahdha de Rached Ghannouchi, et d'Ettakattol de Mustapha Ben Jaafar) qui dirigeait alors le pays. Mais, on ne sait par quel miracle il avait pu garder son poste, après les dernières élections législatives et présidentielle, et comment il avait pu obtenir des prérogatives plus large et des émoluments qui font saliver plus d'un. Ce bilan est bien triste, avec la Tunisie qui est entrée dans un cercle vicieux où plus le dinar baisse et plus le déficit commercial se creuse dû à cette baisse et plus le FMI exige une dévaluation du dinar, d'autant plus grande que le déficit commercial se creuse. Cette dévaluation rampante n'a fait qu'aggraver la crise économique imposant la mise en place de nouvelles stratégies mettant à terme cette hémorragie. Le résultat en est qu'en quatre ans, le dinar tunisien a perdu 49% de sa valeur face au billet vert. Une chute vertigineuse qui inquiète. L'aggravation du déficit commercial a encore érodé les réserves de devises en Tunisie, qui ne couvrent les importations que pour seulement 89 jours, le niveau le plus faible depuis 15 ans, selon des statistiques publiées mercredi 24 janvier 2018 par la BCT. En parallèle et selon les chiffres officiels, le déficit commercial de la Tunisie s'est élevé à 15,592 milliards de dinars (6,49 milliards de dollars) à la fin de 2017, atteignant un record. La BCT avait déclaré sur son site internet que les réserves du pays sont tombées à 12,306 milliards de dinars le 23 janvier, après avoir couvert les importations de 106 jours il y a un an. Chedly Ayari est-il un bouc-émissaire ? Certes non, surtout qu'il n'avait pas préconisé de solution et qu'il n'avait pas joué son rôle de sonnette d'alarme pour remettre au pas les politiciens et s'il est arrivé à ce stade, malgré une carrière assez honorable, il ne peut que se prendre à lui-même. Entretemps, il est nécessaire que le remplacement ne soit pas juste un changement de personnes et que Marouane Abassi ait une vision et un programme pour redresser la barre. Tout le monde a l'espoir, maintenant, que tous les incompétents subissent le même sort, surtout qu'ils sont, encore, nombreux aux postes de responsabilités. Les Tunisiens comptent sur l'actuel gouvernement pour faire le ménage et ne pas subir les conséquences des méfaits des autres.