Le Conseil de l'Instance vérité et dignité (IVD) a annoncé, la semaine dernière, la prolongation du mandat de l'Instance pour une année supplémentaire. Le Conseil a expliqué que l'IVD n'a pas eu le temps de finir sa mission faute de coopération des différentes institutions de l'Etat et s'est engagé à ce qu'elle remplisse tous ses engagements d'ici la fin du mois de décembre 2018. Les réactions sur cette annonce ne se sont pas fait attendre et plusieurs voix se sont élevées pour dire que si l'IVD souhaite prolonger son mandat, elle doit présenter une demande officielle à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), trois mois avant la fin de son mandat initial. Une fois la requêté déposée, le Parlement doit soumettre la demande à une séance plénière pour que les députés puissent voter. Répondant à cela, Sihem Ben Sedrine a appelé les députés de l'ARP à relire la loi relative à la justice transitionnelle avant de leur affirmer que la prolongation du mandat de l'Instance n'était pas une requête mais une décision arrêtée. Et d'ajouter que cette prolongation ne coûtera pas de l'argent vu que l'IVD n'aura besoin, concrètement, que de six autres mois supplémentaires pour finir ses tâches. Du côté du Parlement, une réunion est prévue aujourd'hui, jeudi, pour trancher sur cette demande/décision de prolongation. L'IVD, qui vient tout juste d'organiser un séminaire intitulé « Atteindre les objectifs de la justice transitionnelle : le rôle de la société civile et de l'Etat dans le post-IVD », est accusée de plusieurs erreurs dont, entre autres, celles d'avoir mal géré son mandat initial et d'avoir fait régner une opacité douteuse sur plusieurs dossiers, notamment celui du gendre de l'ancien président Ben Ali, Slim Chiboub. Parmi les propos qui circulent dans les coulisses, certains affirment que l'IVD serait en train de tenter de faire passer douze autres dossiers de réconciliation comprenant des noms des plus controversés ; on y parle de Sakher El Matri, de Belhassen Trabelsi, de Zouhair Sta ou encore de Sami Fehri. Bien que ces éléments n'ont toujours pas été vérifiés, ni niés non plus, leur fréquence devient importante et certains assurent que plusieurs autres hommes d'affaires seraient en train d'influencer les politiques pour qu'ils permettent à Ben Sedrine d'obtenir sa fameuse prolongation en vue de réguler leur situation. La justice transitionnelle s'est posée en Tunisie postrévolutionnaire telle une évidence ; trop de maux laissés par les deux régimes implantés dans le pays après son Indépendance ne peuvent être guéris systématiquement et le peuple avait besoin de se réconcilier avec son Etat. L'idée, en théorie, était bien ambitieuse voire indispensable pour que la Tunisie puisse aller de l'avant. Toutefois, la personnalité controversée de la présidente de l'IVD qui a fait en sorte de se chamailler avec toutes les parties prenantes dans le dossier de la justice transitionnelle a fait en sorte que ce processus devienne un vrai fardeau qui, au lieu d'apaiser les esprits et de faire régner la réconciliation, ne cesse de diviser encore plus les Tunisiens.