Le mouvement de protestation des enseignants du secondaire s'est durci, hier, avec la suspension des cours dans l'ensemble des collèges et des lycées du pays alors que la Fédération générale de l'enseignement secondaire et le ministère de l'Education continuent à camper sur leurs positions respectives, éloignant la perspective d'un compromis imminent. Le taux de suivi de la suspension des cours décidée par la fédération syndicale rattachée à l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) a été suivi hier. 97,6% des enseignants ont «séché» les cours, selon des statistiques publiées par le syndicat. «Les enseignants ont majoritairement adhéré à ce mouvement de protestation pour dénoncer l'entêtement d'un ministère sourd-muet, et qui pose des conditions pour reprendre le dialogue avec la partie syndicale », a déclaré le secrétaire général de la fédération, Lassaâd Yacoubi. «Le mouvement vise à barrer la route à l'intention du gouvernement d'allonger notre vie professionnelle de deux années supplémentaires, d'augmenter les prélèvements sur nos salaires à titre de contribution au sauvetage des caisses sociales et de renoncer à l'école publique qui souffre aujourd'hui d'un grand délabrement », a-t-il ajouté. Le responsable syndical a également rappelé que la partie syndicale réclame aussi la promulgation d'une loi incriminant les agressions contre le personnel exerçant dans les établissements éducatifs, le recrutement des enseignants suppléants et la majoration des indemnités des professeurs, dont le pouvoir d'achat s'est gravement détérioré. La suspension des cours a cependant provoqué le courroux des parents d'élèves, dont certains ont menacé de saisir la justice. Le ministre de l'Education, Hatem Ben Salem, a, quant à lui, menacé hier de prendre des mesures disciplinaires à l'encontre des directeurs des établissements éducatifs qui refusent de fournir à l'administration les listes des enseignants grévistes. «En tant que responsables administratifs, les directeurs des établissements sont tenus de fournir les listes des enseignants grévistes au ministère, mais la plupart d'entre eux ont refusé d'obtempérer», a-t-il déclaré sur les ondes de Mosaïque FM, indiquant que «des mesures disciplinaires seront prises à l'encontre de ces directeurs qui ont violé la loi». Le ministre a également indiqué que la situation des finances publiques ne permet en aucun cas de répondre aux revendications des enseignants dont l'impact financier est estimé à 506 millions de dinars par an. «Nous œuvrons à trouver des solutions en dialoguant avec la direction de l'UGTT, loin de toute forme d'escalade et de calculs étriqués », a-t-il cependant dit. Le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi, a pour sa part fait savoir qu'un compromis sera trouvé dans les heures à venir pour satisfaire les deux parties enseignants et parents. Il a cependant accusé le gouvernement d'«instrumentaliser le différend avec la fédération générale de l'enseignement secondaire pour faire pression sur l'UGTT en ce qui concerne d'autres dossiers comme la cession des entreprises publiques, la réforme du secteur de la santé et la majoration des salaires des fonctionnaires». Outre la suspension des cours, la fédération a décidé de maintenir la rétention des notes du premier semestre, en signe de protestation contre le refus du ministère de tutelle d'ouvrir un dialogue sérieux sur les revendications des enseignants. Ces derniers avaient observé deux grèves le 15 février et le 28 mars derniers pour exiger l'augmentation des primes spécifiques, la réforme du système éducatif et le classement de l'enseignement en tant que métier pénible justifiant un départ à la retraite à 55 ans. Depuis environ deux mois, une seule réunion a eu lieu entre la fédération syndicale et le ministère, le 14 février dernier, que Lassaad Yacoubi a qualifiée de «nulle en propositions». Depuis, les deux protagonistes campent sur leurs positions respectives, puisque le ministre de l'Education a conditionné la reprise des négociations à une levée de la rétention des notes.